mardi 31 janvier 2023

Le Cap des Teches à 1576 m sur la crête de Cornudère, à ski de randonnée sur des petites montagnes... (ou Paloumère à ski de randonnée alpin)

    En allant visiter les montagnes de Cornudère dans le massif de Paloumère (31), l'objectif était d'aller skier sur des montagnes accessibles à cette pratique que quelques semaines par an et ainsi se promener sur des versants qui ont aussi beaucoup d'attraits, malgré leur modeste altitude. Le Cap des Teches (1576m) et le Tuc de Haurades (1554m) sur la longue crête de Paloumère-Bellongue ont le mérite également d'offrir un vaste panorama sur les montagnes du Couserans, la Maladetta, le Luchonais et du Cagire dans la perspective du pic du Midi de Bigorre, sans oublier le piémont.

Photo 1 : En montant sur les dernières pentes... 

Photo 2: La cabane de Roque Pi vers 1380 mètres d'altitude. Ambiance hivernale...

    Ce qui me plaît aussi dans ces conditions optimales c'est de partir pratiquement du hameau de La Baderque (les premiers lacets au-dessus à 850-900 mètres d'altitude) en remontant la route enneigée jusqu'au parking de la fontaine de l'ours à 1194 mètres. Si la route est fermée à la circulation ce qui n'est pas toujours le cas, mais on pourrait le souhaiter, la neige tiendra forcément plus longtemps. De là, on peut se lancer sur la piste forestière (dans cette forêt qui n'a pas accueilli que des randonneurs...), plus enneigée et fermée à la circulation qui nous mènera à la coume de Hiournède. Le paysage s'ouvre désormais sur les pâturages. On gagne alors rapidement la cabane de Roque Pi par des pentes très modérées tout en longeant, à notre gauche, les versants plus raides de la face nord du Cap des Teches. De la fameuse cabane, il n'y a qu'à remonter plein sud, sur 150 mètres de dénivellation, le versant qui nous nargue jusqu'au petits sommets sus-mentionnés, passant devant les enclos à bestiaux juste sous le petit col d'entre les deux sommets.

Photo 3 : En redescendant par la piste.

Photo 4 : En face du refuge...

    

Photo 5: Le Cap des Teches

Photo 6:  Le Tuc de Haurades au fond...

    Voilà il ne s'agissait pas de faire de grandes embardées, mais la descente dans la forêt ainsi que sur la route procure un réel plaisir surtout si, comme c'était le cas, ce week-end, les arbres sont vêtus de la couverture neigeuse abondante. L'endroit est alors réellement féérique... Deux jours après, avec un redoux, la forêt a changé d'aspect, et même si la descente jusqu'au parking est toujours aussi agréable, les pentes nord plus hautes vers les sommets sont l'autre attrait. Et aujourd'hui, en fin de journée, il était dix sept-heures, là-haut, j'étais tout seul et les courbes et jeux de lumières sur les pentes donnaient leur effet maximal, sous la surveillance discrète de la lune qui était déjà de sortie. 

mardi 24 janvier 2023

Dans le Cantal et l'Aubrac, la montagne hivernale à ski de randonnée nordique

    Les impressions d'hiver étaient de retour cette semaine... Pour les éprouver après une si longue et anxieuse attente, les montagnes du Cantal ou de l'Aubrac dans le Massif Central nous ont ouvert leurs portes et avec elles une solitude des grands espaces caractéristiques de ces contrées où le vertige semble horizontal et la vue presque sans fin. Un grand bol d'air par temps froid dans lequel le blanc sera le ton enchanteur.

Photo 1: Le buron de Barbès...

    Tout d'abord... Il fut facile de s'en aller sous le Puy de Bâne et le buron de la Rode, par le versant sud du massif du Cantal, entre Pailherols et Malbo, en ce jour, laissant la voiture au bout de la piste vers Labro à 1110 mètres d'altitude... Un buron est un bâtiment en pierre, couvert de lauze ou d'ardoise que l'on trouve sur les "montagnes", pâturages d'altitude possédés par le éleveurs de la vallée et exploités de manière saisonnière  dans le cantal, l'Aubrac, le Cézalier et les Monts Dore. Ils servent à abriter la fabrication du fromage et à loger les buronniers. 

    La tramontane soufflait assez fort et ne nous aura pas permis de monter sur les crêtes. Qu'importe, à nouveau pouvoir tracer son chemin dans la neige vierge, sur des pentes douces mais irrégulières, aux formes presque érotiques sous le soleil qui malgré le vent dévoile quelque peu les figures du paysage nous aura suffit. La zone est entièrement clôturée, quelques burons pointent ici et là et lorsqu'on se retourne, un paysage nous rappelant ceux enneigés des tableaux de Brueghel l'Ancien nous apparaît et nous enchante. Un lièvre s'échappe au loin ... 

Photo 2: Au loin, le puy de Bâne.

Photo 3: Un peu plus loin au dessus que la précédente... Vue en direction de l'oues...

       
 Dans l'Aubrac (mais toujours dans le département du Cantal), le temps était couvert, le lendemain, et les températures comme la veille, proches de -10°C. Loin des villes, en quittant le petit village de La Trinitat vers 1210 mètres d'altitude, dont la liste des noms de soldats tués lors de la Grande Guerre est plus longue que celle des habitants permanents d'aujourd'hui (avec un maximum démographique de 500 habitants en 1806 tout de même...), nous avons remonté la vallée du ruisseau du Peyrou, fermée sur le haut par la forêt domaniale du Prieur. Personne aux alentours. Une petite escapade au sommet arrondi presque plat modeste de Catau à 1309 mètres, pour entrevoir les espaces ouverts vers l'ouest, quelques burons isolés et l'on est revenu dans la forêt balisée pour rejoindre le hameau des Fajoux avant de retourner au point de départ, après une bonne dizaine de kilomètres, admirer une dernière fois l'église romane surmontée d'un clocher à peigne avec un escalier permettant de l'approcher (mais fermé en ce jour) ainsi qu'une croix de granit, et discuter chaleureusement avec visiblement un des rares habitants du village. Normalement par beau temps, depuis les monts de l'Aubrac, la vue sur les monts du Cantal est panoramique. En ce jour, seuls le Plomb du Cantal et le Puy Griou se sont laissés observés, de manière un peu furtive, avec une lumière douce tel un projecteur sur leurs versants sud.

Photo 4 : En direction du sommet de Catau

Photo 5 : En remontant la vallée du ruisseau de Peyrou. Vue vers le sud-ouest.

  Voilà que ces deux jours auront permis de reprendre contact avec le ski nordique, celui originel qui permettait simplement de se déplacer, sans ARVA ni GPS, avec pour simple outil une carte topographique, nos chères et précieuses cartes de notre IGN national, en traçant sa route là où on veut, sans risque d'avalanche.  

 Pour prolonger ces visites, on ira se replonger avec plaisir dans les livres de Pierre Soissons, éternel amoureux de ces montagnes, et notamment le très beau dernier "Burons, Cantal, Cézalier, Aubrac" aux Éditions Quelque part sur terre. Et surtout merci G.!


dimanche 15 janvier 2023

Même au Musée d'Orsay (exposition sur la peintre Rosa Bonheur) et sur Arte (Les Pyrénées secrètes)...

    L'exposition au musée d'Orsay à Paris des peintures de Rosa Bonheur qui se terminait aujourd'hui nous aura permis d'admirer quelques productions dont le dénominateur commun était les Pyrénées. Près de 200 oeuvres de l'artiste étaient donc rassemblées à l'occasion du bicentenaire de sa naissance (1822-1895), et même si elle a surpassé dans son domaine, la peinture animalière, bon nombre de ses confrères masculins, et qu'elle fut une femme libre et libérée (symbole notamment pour l'émancipation des lesbiennes) et que ce n'était pas facile à cette époque, je dois avouer que j'étais venu uniquement pour ces toiles-là et que je ne  connaissais pas l'artiste avant. 

Photo 1: On admirera autant le talent du photographe que celui de la peintre...

    Son talent de portraitiste animalier est évident car elle capte l'âme des animaux qu'elle peint et dont on peut sur beaucoup de ses productions voir le regard singulier et significatif de ceux-ci, en toute discrétion, ce qui donne à ses tableaux finalement beaucoup de vie. Ce que j'y ai trouvé d'intéressant aussi, notamment concernant ceux ayant pour cadre les Pyrénées, mais beaucoup d'autres aussi, c'est que cela rendait la montagne vivante, ne la cantonnant pas dans une image romantique et solitaire, autrement dit "sauvage". Il est vrai qu'elle fait un magnifique paysage du cirque de Gavarnie solitaire qu'elle intitule simplement Paysage de montagne (28x51,2 cm, Musée départemental des peintres de Barbizon), mais le Pyrénéiste averti l'y reconnaitra sans doute avec sa cascade. Dans le livre relatant l'exposition vendu à la boutique du musée, après le titre du tableau, il est d'ailleurs écrit "[Les Pyrénées]". Pour les autres, notamment Moutons au pâturage dans les Pyrénées (huile sur toile, exposée normalement au Dahesh Museum of Art de New York), le portrait des bêtes n'enlève en rien à la beauté des montagnes en arrière plan et la présence des humains aux alentours. Pour celui-ci le jeune berger est là, discret au second plan, assis et perché sur un rocher au soleil en train de surveiller les bêtes paisibles, dont certaines se reposent à l'ombre près d'autres rochers comme elles ont l'habitude de faire dans ces moments de chaleur-là. 

Photo 2 : Muletiers des Pyrénées... L'affluence à l'exposition était telle que ce ne fut pas toujours simple de prendre la photo comme il faut en étant seul bien devant...

    Enfin, dans le dernier Muletiers des Pyrénées (1879, huile sur toile, 66x82,3 cm, conservé au Aberdeen Archives, Gallery and Museums), on retrouvera au premier plan les deux mules chargées accompagnées d'un muletier assis à l'arrière ainsi que deux autres qui arrivent sur le sentier un peu plus loin, montrant une montagne vivante. À l'arrière plan toujours, légèrement enrobée de nuages, on retrouve la montagne majestueuse, qui personnellement m'a fait penser à une reproduction la face nord du Vignemale mais avec un caractère alpin et austère nettement moins accentué. Un autre tableau Muletiers espagnols traversant les Pyrénées (117x200 cm, huile sur toile, 1857), non présent dans l'exposition reprend le même thème, et nous fait dire que dans celui exposé au Musée d'Orsay, les muletiers représentés sont probablement espagnols, atténuant le côté barrière sauvage d'un massif qui a toujours été traversé. Au Musée Condé de Chantilly, on retrouvera aussi une scène pastorale avec le beau Berger des Pyrénées donnant du sel à ses moutons (1864, huile sur toile, 68x100 cm), ces derniers de race basco-béarnaise certainement. Le Sevrage des veaux (1879, 66x82m), prêté par le Metropolitan Muséum of Art de New York est aussi exposé sans que l'on sache si les montagnes représentées sont les Pyrénées. Un dernier Berger des Pyrénées est exposé (1888, huile sur toile, 60x81 cm) au Brigthon Museum and Art Gallery en Angleterre. Les Pyrénées restent visiblement donc une destination importante de ses voyages (principalement en France mais aussi en Écosse) dans laquelle elle semble ressentir la beauté grandiose des montagnes et où elle peut étudier à sa guise les animaux, notamment les ânes ou les moutons qu'elle affectionne tant et qu'elle a peint en beaucoup d'autres endroits. Elle vient dans le massif notamment en 1850 pour aller aux thermes de Luz Saint-Sauveur (65) et y retournera plusieurs fois.

Photo 3 : Ça ressemble au Cirque de Gavarnie tout de même! Qu'est-ce que vous en pensez?

    Cette idée de montagne humaine vivante, ce n'est pas tout à fait le créneau choisi par la réalisatrice du trytique documentaire, Alwa Deluze et son conseiller technique à la réalisation Gregory Ortet. Comme son nom l'indique Les Pyrénées secrètes (visible sur Arte jusqu'au 18 janvier 2023) insiste davantage sur la caractère sauvage de la montagne, dont la sauvagerie serait indéniablement abîmée par les humains, en proposant un découpage en trois épisodes donc : La genette, discrète du Piémont, L'ours le roi des forêts ancestrales et Le gypaète barbu, corsaire des cîmes

Photo 4: Une capture d'écran, Arte le 15 janvier 2023

    Plus qu'un documentaire animalier, il s'agit ici davantage peut-être d'un discours sur la nature avec forcément, puisqu'il s'agit d'un exercice d'écriture, un parti pris intellectuel. À la fin du premier épisode, on pourra entendre "Il est temps de rentrer, de rendre ce monde à lui-même. Vous repartez avec un savoir, un fragment des Pyrénées au fond de vous. La nature parle. Elle parle une langue universelle, une langue d'où nous venons et qui nous échappe. La nature est un monde, le monde sauvage où se confondent notre humanité, le monde premier où germe notre liberté. Et vous savez que demain à nouveau vous repartirez dans la montagne." Il est évident que le choix de l'animal totem de ce premier épisode, la genette, peut être discutable d'un point de vue "naturel" puisqu'il n'est pas dit dans le film qu'il n'est pas endémique aux Pyrénées. Il aurait été importé en effet par les romains ou les arabes d'abord comme animal de compagnie depuis le Maghreb. Il n'est pas dit également que sa présence est attestée sur quasiment tout le territoire français avec une présence permanente dans un grand quart sud ouest de la France. Qu'on soit d'accord avec ce discours ou pas, que l'on pense que la nature existe ou pas, il reste que ce film est attachant de par la mise en scène poétique de cette quête de la genette qu'on finit par trouver sur son arbre (car elle est arboricole), car c'est vrai qu'elle est discrète (et gracieuse), et que cette quête nous fait également découvrir les autres habitants qui cohabitent dans ce piémont (les renards, les sangliers, les chevreuils, les blaireaux, la petite belle ou belette et autres noms d'oiseaux...). De part l'origine des deux réalisateurs, on retrouvera également de nombreuses prises de vue du Comminges, de la région de Salies du Salat, avec notamment l'attachant lac de Touille et ses colverts ou poules d'eau, dominé par le pic de Cagire ou le massif de Paloumère. 
    Alors, lorsqu'une visite vous mènera au Musée national du Moyen-Âge de Cluny à Paris, pour admirer la fameuse série de tapisseries de La Dame à la licorne, vous ne pourrez peut-être pas vous empêcher, surpris, en observant celle intitulée le Goût, en observant le bestiaire, de vous exclamer heureux presque avec émotion: - Ahhh... une genette (en haut à gauche...)
    Pour aller plus loin concernant la genette vous pouvez lire l'article de Virginie Muxart, Essai sur la valeur symbolique de la genette dans la littérature et l'art médiéval occidental, tiré du livre L'animal symbole de Marianne Besseyre, Pierre-Yves Le Pogam, Florian Meunier.