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samedi 30 octobre 2010

Taganana et la côte nord, Tenerife (Canarias).

Comme nous n'avions pas assez marché pour aller au volcan (!!!), nous nous sommes ajoutés le dernier jour, le jeudi 28, une très belle balade sur la côte nord, à une grosse heure de bus de Santa Cruz.

Nous avons choisi l'itinéraire grâce à la carte Freytag & Berndt achetée plus tôt à Santa Cruz et sur laquelle étaient indiquées les différentes possibilités, sans trop honnêtement savoir à quoi s'en tenir même si j'avais vu quelques photos sur divers bouquins (voir aussi Trekking en Afrique, mentionné l'autre jour). Ceci dit, on avait bien compris que la côte nord était plus humide (tout est relatif) que la côte sud et donc, le paysage serait forcément assez différent, étant donné ce que nous avions vu dans les environs de Puerto de la Cruz. Alors donc, nous avons pris le bus, via San Cristobal de la Laguna, classée au patrimoine de l'Humanité, dont le quadrillage a servi de modèle aux villes d'Amérique. Nous ne verrons que la station de bus et quelques belles demeures sur le passage. A onze heures, après un itinéraire des plus sinueux, sur la crête entre deux versants verdoyants mais abrupts, avec vue sur les deux côtes, nous sommes descendus à El Bailadero, vers 750 mètres d'altitude.

Photo 1 : Au dernier plan, on peut apercevoir le port de Santa Cruz, mais c'était pas l'objectif. Prise depuis la route avant de prendre le sentier. (Photo de Claire, qu'on peut agrandir, comme toutes les autres, en cliquant dessus.)


Nous avons commencé là notre itinéraire pédestre, d'abord le long de la route pour gagner un sentier au bout d'un kilomètre. La route est bordée de falaises, le long d'une forêt d'arbustes géants qui nous faisaient penser à de la bruyère, parsemée de plantes grasses, que je ne croyais pouvoir exister qu'en pot et en version rabougrie dans le jardin de mes parents.

Photo 2 : Claire est toujours inspirée par la chlorophylle (moi aussi). Alors on va passer du temps à les regarder le long de la route.


Il est indiqué dans les guides et diverses brochures que cette partie de la côte héberge une des dernières forêts primitives. Nous n'avons pas pu savoir si c'était celle que nous traversions mais par endroit, la pente aidant, elle paraissait inextricable. Ajoutez à cela un panorama, depuis la route, à couper le souffle, sur les deux versants et les côtes découpées, abruptes mais jalonnées de belles plages de sable noir, d'eau transparente et de villages blancs. Inutile de vous dire qu'il faisait beau?

Le cheminement se poursuit par le sentier le long de la crête, quelque peu filou au préalable, mais presque parallèle à la route, et qu'on retrouve de manière claire et balisée après un refuge (en fait une cavité creusée dans la roche), et un petit parking un peu plus loin. Nous nous ferons souvent dépasser par des voitures de location pour touristes.

Une fois sur le chemin, nous ne le quitterons plus jusqu'au hameau de Benijo, tout en bas, sur un promontoire rocheux, dominant la Roque de la Rapadura et sa belle plage, dont le bleu de l'eau nous attirera irrésistiblement. La chaleur, qui sur terrain dégagé nous est apparue insupportable, ne nous atteint pas tant que le couvert forestier nous protège, jusqu'à une altitude de 500 mètres. De temps en temps, une trouée dans la canopée nous permet d'admirer le panorama. Nous en avons profité pour faire une pause repas et repartir tranquillement jusqu'au prochain point de vue, après la Cabeza del Tejo.

Photo 3 : Deux possibilités pour cet énergumène devant le paysage, au-dessus d'Almaciga: a- ouaihhh, c'est beau. b- dis-donc, ça ne fait pas trois jours que tu portes la même tenue? (photo de Claire, forcément!)


Toute la partie nord de l'île (les montagnes de l'Agana) est parsemée de sentiers balisés et quand l'hiver est trop agressif chez nous, ça peut paraître une bonne opportunité d'y venir. D'ici, le volcan du Teide n'est pas toujours visible et quand il apparaît, c'est la cerise sur la gâteau. En plus, pour notre itinéraire, le dénivelé n'est que descente (pratiquement) ou plat... Alors, vraiment, c'était facile. Je ne mentionnerai même pas le nombre d'heures nécessaires.

A l'arrivée au village, nous nous sommes précipités dans un café avec vue sur la plage en contre-bas, pour nous désaltérer, à un prix dérisoire, vraiment dérisoire et avec la gentillesse en plus, comme toujours pour nous à Ténérife. Ensuite la plage, avec une ambiance un peu surfeuse, donc je dirais proche de la nature: tellement proche que certains sont à poil, pâles comme de l'aspirine (j'ai gardé mon slip blanc Isabelle...), d'autres avec leur combinaison pour affronter le plus longtemps possible les belles vagues, un groupe avec leur chien.
Il y a un peu de monde mais un esprit de tolérance, de liberté et de tranquillité semble souffler jusqu'ici ici. J'observe, un peu à l'écart, la faune canine qui s'ébroue au milieu de ces congénères humains, remuant la queue, venant à l'un, puis à l'autre pour s'immobiliser face à des individus particulièrement respectueux des bêtes, à deux mètres des propriétaires, "funs" dans leurs combinaisons.
- Regarde, regarde... (avec l'intensité croissante dans la voix de ceux qui sont en train d'observer un phénomène exceptionnel et soudain)
- Quoi encore? Laisse-moi prendre des photos de cailloux...
- Mais regarde...(hystérique)
- ...
- Il leur chie devant...c'est énorme!
Mais ici, les amis des bêtes sont légions et dans un respect immense, le produit reste là. Personne ne bronche...

Photo 4 : Ah t'es beau avec ton maillot, là-bas! (photo de Claire)



L'eau est bonne. On est restés plus d'une heure puis on est repartis, à pied, sans trop se presser, vers le hameau et Almaciga, le village suivant, pour reprendre le bus de 18h10 qui nous ramènera, pour un euro trente, vers Santa Cruz. Le village, terminus de la ligne bus, est lui aussi sur un promontoire qui domine la playa de Benijo, emplie de surfeurs. Les montagnes qui tombent dans l'océan, par des versants abrupts de plusieurs centaines de mètres, dont certaines parties sont encore exploitées et apportent une touche de vert cru dans le paysage, sont impressionnantes en cette fin de journée.

Photo 5 : Dans le village d'Almaciga.

J'en profite pour me promener dans les ruelles du petit village, me grisant de portes colorées sur fond blanc. La vue sur le village de Taganana, dernier village sur ce littoral, depuis le bus, me restera longtemps en tête. Là, pas de photos, vous n'avez qu'à y aller!

jeudi 28 octobre 2010

Santa Cruz de Tenerife (Canarias).

On ne se rend pas au Pico de Teide, aux Canaries depuis Toulouse, comme on peut le faire pour une ascension pyrénéenne, forcément. On ne fait pas l'ascension d'une montagne même avec une telle personnalité sans occulter l'environnement et le pays qui l'entourent, là aussi, évidemment. En tout cas pour nous. J'y ai été d'autant plus sensible que nous avions tous les deux l'image d'une île de Tenerife (Toponyme d'origine amazighe -dans cette langue berbère, Tin Irifi signifie « endroit de la soif »-), obnubilée par le tourisme de masse, ne sachant pas trop à quoi nous attendre. Ce dernier est bien présent mais c'est à chacun de s'en accommoder et surtout de l'éviter. Ce que nous avons fait.

Donc, rendez-vous en voiture, en écoutant Bebe,


pour se mettre dans l'ambiance ibérique, à l'aéroport de Gerone, en Catalogne espagnole, pour s'envoler avec Ryanair. Visite nocturne dans cette ville, de l'étonnant (pour les incultes comme moi) vieux centre (Barri Vell) et sa place harmonieuse devant la cathédrale Santa Maria.

Le volcan est déjà là, au bout de trois heures, depuis le hublot, chaperonnant de sa masse toute l'île. Nous atterrissons sur l'aéroport sud de l'île, après le retentissement du coup de clairon, dans la cabine (oléee...). Situé à environ une heure de bus (6 euros et quelques et un bus toutes les demi-heures) de la capitale provinciale, nous nous rendons à Santa Cruz de Tenerife pour passer la première nuit avant d'envisager le volcan (point culminant de l'Espagne, tout de même!).

L'arrivée dans l'île puis la ville me fait penser immédiatement à l'Andalousie, avec les maisons blanches ou colorées, la lumière quelque peu aveuglante. L'accent des habitants, qui semble avaler les syllabes finales, lorsqu'on se précipite au marché de Nuestra Siñora de Africa, pour manger des empanadas, me conforte dans cette impression, même si mon niveau d'espagnol ne me permet pas encore toujours de nuancer réellement.

Photo 1 : Au fond, l'église Nuestra Siñora de Africa, en plein milieu de la profusion de fruits tropicaux du marché. Taganana est située derrière l'ultime ligne de crête.



Pour ne rien oublier, j'ai englouti aussi une pâtisserie, dénommée Tocino de cielo, bien sucrée avec sa couche supérieure à base d'oeuf, ressemblant au dessus d'une crème brûlée, mais molle, avec sa madeleine en-dessous. Cela m'a fait penser à une pâtisserie dégustée il y a quelques années à Malaga.

Photo 2 : Le choix pour les empanadas: poulet pour Claire et viande pour moi.


Et pourtant, les formes de reliefs très découpées, en fines crêtes, sur une partie, en arrière plan de la ville, le substrat volcanique, de couleur noire qui se retrouve jusque dans les matériaux utilisés pour la construction des bâtiments, nous rappellent qu'effectivement l'Espagne continentale est assez loin. Le continent africain, à à peine plus de cent kilomètres à l'est est moins éloignée. Il évoque aussi l'île de la Réunion. Pourtant...pourtant. Tout n'est pas perceptible de prime abord.

Nous filons alors poser nos affaires, à la pension Casa Blanca, calle Vieja y Clavijo, dans le centre, où j'avais réservé quelques jours plus tôt. L'accueil quelque peu nonchalant du patron, me rappelle l'attitude de certains caribéens. J'adopte donc ma tactique habituelle sans me forcer, ni me démonter : je souris et je fais ce que je veux dans le respect et la discrétion, naturellement de tout façon. Bien sûr ça marche. La gentillesse des gens est de toute façon évidente. Donc, je me sens à l'aise tout de suite... Nous sommes en voyage et pas là pour stresser...

Photo 3 : On ne stressera pas à la pension Casablanca.


L'après-midi nous emporte dans le centre ville, vers la place d'Espagne, descendant directement par les petites rues piétonnes, traversant l'itinéraire de la ligne de tramway (eh oui) qui relie le bas (le centre de l'activité de la ville) et le haut, plus résidentiel. Il fait faim mais les boutiques diverses nous retiennent un peu de temps au passage, histoire d'hésiter devant un tee-shirt, copie d'un maillot de l'équipe de foot-ball des Pays-bas à l'effigie du célèbre numéro dix, "Van Aperder". Enfin, nous trouvons ce qui nous convient. Claire veut manger équilibré sans déroger à la culture gastronomique locale, alors :
- Una tortillita, señora?
- Heuu, si, si...
Et voilà, une tortilla pour vingt...!!!
L'ensemble du centre de la ville est parsemé de parcs, plus ou moins grands, que nous découvrirons au fur et à mesure. Les rues sont ombragées par des rangées... mais non... Je ne rêve pas! des flamboyants (enfin, je ne crois pas mais ça y ressemble fortement) dont il ne reste que quelques fleurs car ce n'est plus la saison. Mais cela ajoute à la confusion des sens. Des neiges saisonnières du pico de Teide, on passe à la végétation de type tropical. Sous quel climat sommes-nous?

Photo 4 : Oui, je vous le demande: sous quel climat sommes-nous? Il faisait bien bon. On n'a pas eu l'impression que les gens se couchaient tard. Mais c'était appréciable de voir des réunions de mamies sur les terrasses ou les bancs publics en soirée. (photo de Claire)


Nous passons un moment à chercher une librairie qui propose des livres en français. Ainsi, j'ai le temps de regarder les livres sur l'archipel et en même temps de le découvrir davantage dans la première qu'on nous indique, La Isla, où le dernier jour je craquerai pour un beau livre plein d'images et surtout un Gran atlas tematico de Canarias! Le maillage serré des librairies du centre nous pousse vers une librairie des femmes (c'est le nom en espagnol), une librairie Le petit coq (en français, mais pour enfants...), une autre où j'achète une carte au cinquante millièmes pour enfin trouver celle qui nous convient, calle Porlier.

Entre temps, nous serons allés visiter l'église de la Conception, de style baroque et toscan, au plafond de bois, construite en roche volcanique, puis crépie de blanc, le long de la rivière asséchée descendant des collines. Se situant sur le site du premier édifice construit par les conquistadors, au milieu d'un quartier ancien aux maisons colorées, l'ambiance en cette après-midi est ...comment dire, spirituelle, culturelle! Mince, en ce lundi, c'était la fermeture hebdomadaire des musées. Pas de chance. Vous nous croyez?

Photo 5 : Au fond, à droite, l'église de la Conception.


Mais il fait chaud et on a soif. Nous résistons à l'envie de nous arrêter dans le pub irlandais de la place voisine pour remonter vers le haut de la ville et nous contenter d'acheter une bouteille d'eau dans un petit supermarché. La mondialisation ne nous a pas influencés... Un petit regard dans le magasin de souvenirs voisin : Claire est tentée par un magnifique volcan en plastique noir, kitchissime, à trois euros... Non c'est pas vrai.
Le bas de la ville est quelque peu décevant car il est coupé de l'océan par le port, vaste, qui bouche l'horizon et le boulevard urbain qui le longe. Du coup, on ne trouve pas de grandeur dans l'alignement d'immeubles résidentiels et des bâtiments officiels qui sont là. C'est dommage, car il y a un bassin avec des murs de verdure. Et en cette fin d'après-midi, l'animation monte doucement avec la réouverture de la plupart des magasins. La mairie semble avoir compris. Des panneaux indiquent un projet de réappropriation piétonnière des lieux par des sortes de tunnels pour les voies de circulation automobile. Cela n'empêche néanmoins pas les joggers de s'enflammer à la vue des crêtes découpées et déchiquetées au nord, vers San Andres.

Photo 6 : La façade portuaire de la ville et les ferries prêts à partir vers les autres îles et surtout vers las Palmas sur Grand Canaria.


Finalement, après cette après-midi bien dense, nous échouons au café atlantico, devant le bassin aménagé, entre l'Alameda Duque Santa Elena et la place d'Espagne. C'est un lieu de rendez-vous agréable, lieu de passage important : ce qui me permet, non de regarder les jolies passantes, mais un magnifique dégradé de lévriers marrons, tenus en laisse par leur propriétaire. Puisque on est là en voyage, il faut en profiter pour déguster la gastronomie locale et donc en guise d'apéro un petit vino tinto, accompagnant un plat de papas arrugadas con mojo (c'est la sauce, huile d'olive, piments, cumin, aïl.... aïe, aïe, aïe, c'est délicieux).

Photo 7 : Tout ça pour dire que Claire est aussi patiente car je l'ai traînée ici tous les jours passés à Santa Cruz. Et tous les jours, on a commandé les papas (et non patatas) arrugadas con mojo. Et, comme on peut le comprendre légitimement, je pense qu'elle s'est un peu lassée des pommes de terres... La Dorada est la bière locale. Devinez où j'étais assis?



Nous sommes pleins (l'estomac, je veux dire), et nous pouvons donc aller manger! Voilà, je ne vais pas vous faire croire que Santa Cruz est la plus belle ville du monde. Mais on s'y est sentis à l'aise. Et de voir des choses aussi jolies et intéressantes, de fréquenter certains mêmes lieux, certains mêmes serveurs (...) nous ont donné l'impression de vivre un moment familier. Et pour ça aussi c'était bien.

mercredi 27 octobre 2010

Pico de Teide 3718m (Canarias).

- Alors vous partez aux Canaries pour les vacances? Vous allez grimper le pico de Teide?
- Mais oui.
- C'est parce qu'il fait plus de 3000 mètres que vous en ferez l'ascension?
- Mais oui...
- Pourtant, il n'est pas dans les Pyrénées!
- C'est pas grave. Il est en Espagne.
- Et alors?
- Et alors, les Pyrénées sont bien en Espagne! Comme les Canaries. Donc, c'est pareil!

Bien sûr, avec Claire, nous aurions pu prendre le téléphérique qui nous porte sans aucun effort à 3550 mètres d'altitude mais vous ne nous auriez pas cru.

Photo 1 : La gare d'arrivée du téléphérique, vue depuis le chemin qui redescend du sommet. Les pavements du chemin sont nettement visibles, ainsi que la caldeira au second plan.

Alors nous avons choisi un cheminement un peu plus long, un peu plus long que la voie normale même (départ de 2325 m) et qui partait d'El Portillo (de la Villa) à 1950 mètres, où s'arrête la forêt de pins. Nous nous sommes fait déposer là par le bus quotidien qui part, à 9h15, de la ville côtière de Puerto de la Cruz pour se rendre au Parador de Cañadas del Teide. On a eu juste peur à un moment, à la station de bus, de s'être trompés, et d'aller au rendez-vous d'une sortie randonnée d'un club du 3ème âge allemand. Tout le monde avait l'air content de se trouver là. Pour les topo-guides classiques, vous pouvez utiliser, en espagnol, Los techos de España, de J.M. Hernandez, qu'on peut trouver dans une librairie spécialisée de montagne, à Barcelone, près de la Iglesia de Santa Maria del Pi du barrio gotico (Llibreria Quera, 2 Calle Petritxol) ou Trekking en Afrique, guide des meilleurs itinéraires, de S. Ardito, aux éditions Gründ. Voici aussi, le lien d'un blog, extrêmement complet et intéressant pour préparer son ascension et son voyage à Tenerife, .

Etaient donc au programme au moins 1300 mètres environ de dénivelé positif pour atteindre le refuge d'altavista, (voir photo 2 ci-dessous) à 3260 mètres, où nous comptions passer la nuit pour achever l'ascension au petit matin et voir le levé de soleil.


A titre indicatif, il faut savoir que le sommet est libre d'accès qu'avant 9h le matin et qu'après 17h le soir, avec la preuve du paiement de la nuit du refuge. Pour le reste de la journée, il faut avoir sollicité une réservation au préalable, un peu de temps à l'avance, pour un créneau horaire : cinquante personnes sont autorisées à faire l'ascension finale, à partir de la gare d'arrivée du téléphérique, par tranche de deux heures. On touche là une des contradictions du système. En effet, le refuge et le téléphérique sont exploités par la même entreprise. Alors, on bourre un maximum les cabines et après, on est obligé de limiter la fréquentation, que l'on surveille étroitement pour cause de classement en parc national, depuis au patrimoine de l'humanité de l'U.N.E.S.C.O.. Le sommet au dessus du cratère est aussi étroit et peu étendu, entre les fumeroles de souffre. Le refuge n'est pas donné (20 euros la nuit, sans service de restauration), les dortoirs inaccessibles à partir de 6h30 du matin (7h15 pour Claire!!!) jusqu'à 17heures, je crois. Il y a des machines automatiques qui pour la modique somme de 4 euros, vous vendent un coca, un sprite ou autres sodas divers, ou pour deux euros un café. Mais, il faut reconnaître que c'est impeccablement propre (notamment les toilettes), qu'on vous prête des couettes pour la nuit et qu'il peut être chauffé. Chacun y trouvera source à palabres.

Donc nous partons, cheveux au vent et pour Claire, comme d'habitude, en tenue légère, malgré la chaleur de cette fin de matinée. L'envie nous porte, je dirais même, nous transporte (hum...). Ce pic, ça faisait longtemps que je voulais y aller (où n'ai-je pas envie d'aller?), et on le voit tellement partout et de (presque) partout sur l'île que ça en devenait une véritable obsession. En plus, il est beau.

Photo 3 : Le pico de Teide, dans toute sa splendeur, dont le terme Teide proviendrait du terme guanche echeide qui signifie « enfer ». En effet, pour les premiers habitants des îles Canaries, le volcan et ses environs étaient interdits d'accès. Une autre éthymologie dans cette langue donne pour signification « montagne enneigée ».Notre itinéraire rejoint l'épaule blanche sur la gauche (Montaña blanca).

Alors, après avoir soigneusement choisi, au centre de visite, l'itinéraire balisé (pour ne pas dire encadré, sans aucune mais aucune difficulté technique, jusqu'au sommet) qui nous y mènera, nous bifurquons.
- Dis-donc, le promontoire rocheux, là-bas, c'est pas celui qu'on a vu l'autre jour sur la carte postale?
- Non, je crois pas car ce n'est pas le bon versant.
- Tu crois? Si, si, je suis sûre!
- Non, c'est pas possible car sur la carte, on voit le téléphérique et pas là.
- Si, je t'assure! Qu'est-ce qu'on pari? Un petit livre?
- Ok, mais pour aller vérifier, il faut faire un détour par le chemin qui descend par là et on devra faire une boucle qui rallonge ...
- Ouais, tu ne veux pas dire que tu te trompes. On y va...
- Avouer à une femme que je me suis peut-être trompé ne me pose aucun problème... (de suite les grandes phrases!)
Nous descendons donc dans la petite plaine, en direction de la Fortaleza (parois rocheuses).
- A ouais, tu as raison...
Nous sommes trop engagés et donc nous faisons un peu de distance supplémentaire. Ce n'est honnêtement pas un problème. Les tons orangés l'emportent avec toute une série de dégradés. La chaleur augmente. La végétation reste buissonnante mais maigre. Les vipérines rouges du Teide sont décharnées. Et plus on monte, et donc que l'on s'approche du cône, plus le terrain est parsemé de gros blocs ronds de basaltes, expulsés depuis (depuis quand d'ailleurs?), un véritable champ.

Photo 4 : A l'assaut des blocs de basalte, Claire est emportée et se retient comme elle peut.


Les itinéraires sont impeccablement balisés et nous avons l'impression de marcher dans le désert sous la surveillance du volcan qui se rapproche. Seuls des petits oiseaux, appelés Pipit de Berthelot, nous accompagnent parfois.

Photo 5 : La Fortaleza, à gauche au fond, depuis les pentes de la Montaña blanca. La piste au premier plan, concerne la voie normale qui descend vers les parkings sur la droite. Nous la prendrons au retour.




Nous attaquons la montée vers la Montaña blanca (2750m), une sorte de petite épaule sur notre gauche, pour arriver en longeant la dernière coulée de lave (17ème siècle???, je ne me rappelle pas de ce qu'il y avait exactement écrit sur le panneau d'information! Et puis on s'en fiche, ce qui compte, c'est que c'est la dernière).

Photo 6 : On s'approche! Le refuge est situé derrière la partie supérieure de la coulée de lave du centre (qui est aussi la plus récente).


La pente se relève sérieusement à partir de là. Il fait vraiment chaud : Claire a préféré se déguiser en schtroumpfette (vous aurez deviné la couleur de sa veste) plutôt que de se transformer en piment d'Espelette. Quant à moi, ça fait déjà un moment (depuis le départ en fait), que j'ai revêtu ma combinaison de cosmonaute. Face aux rayons de soleil trop brûlants, je couvre quasiment toutes les parties de mon corps (sauf le nez, qui crame donc parfois!), à croire que je reviens d'un vide grenier, car j'ai renoncé à m'enduire le corps de tout élément gras protecteur. Au bout de la 2ème ou 3ème couche, je ne sais plus ce qui me recouvre: de la crasse certainement... Le versant semble interminable, et toutes les vingt secondes, on peut entendre:
- Oh, c'est beau, c'est beau!
C'est vrai qu'il suffit de se retourner pour admirer la caldeira (vaste dépression, de forme grossièrement circulaire , formée par l'effondrement de la partie centrale d'un cône volcanique) qui s'étend à nos pieds, avec toutes ces couleurs. Au fur et à mesure de la montée, le paysage prend de l'ampleur et s'ouvre considérablement, rapetissant ce qui pouvait nous impressionner plus bas.

On cherche le refuge du regard. Ne le trouvant pas, on se demande bien où il peut être. L'itinéraire passe entre deux coulées noires, refroidies depuis longtemps. Nous avons les sacs qui comportent toutes nos affaires pour le séjour, et comme cela ne suffisait pas, Claire s'est chargée de tous les beaux cailloux qu'elle voit. Mais peut-être devrions-nous être plus discret sur cet aspect! Le versant, ample, décidément, me paraît interminable pourtant j'ai l'impression d'être en forme, physiquement et moralement. Puis finalement, le refuge apparaît sans crier gare.
Il est tôt, 16h30. Que pouvons-nous faire? Je n'ai pas envie d'attendre le lendemain pour monter. J'ai des fourmis dans les jambes, des palpitations, je parle, je parle. Bon, on y va, après s'être inscrit au refuge. On sera accompagné d'un couple, agréable, dont nous venons de faire la connaissance et qui semble converti à mes arguments: je, finalement, on voudrait voir le coucher de soleil. Alors, on repart pour se rendre bien compte que l'ascension n'est pas courte, car il reste encore plus de cinq cents mètres de dénivelé. Le chemin est particulièrement aménagé, notamment dans la partie finale, où il ressemble à un escalier avec des marches de basalte. Immanquablement, je repense au Fuji San (bon, là je me la joue un peu!!!). Claire m'a abandonné car nos opinions divergeaient sur le chemin à prendre pour atteindre le sommet dans la partie finale: elle voulait aller au plus court, donc tout droit et je voulais suivre le chemin (la peur du gendarme???). Enfin, on arrive en même temps, quasiment.

Comment vous décrire le panorama fantastique, à 360°, sans tomber dans les poncifs? Plusieurs îles de l'archipel sont bien visibles à quelques dizaines de kilomètres de l'île de Tenerife. Cette dernière se découvre dans sa quasi-totalité, à l'exception de la région de la ville de Santa Cruz. La température est encore agréable. Les nuages forment dans certains endroits une véritable mer de nuage. Enfin, le soleil se couchant petit à petit, la projection progressive et géante de l'ombre noire du volcan se fait vers l'est. On domine tout cela et dire que c'était fantastique, n'est pas usurpé. D'autant plus, que dans un premier temps, nous étions seuls au sommet. Nous partageons ces moments en suivant avec nos deux compagnons de montée (qui n'auront pas regretté de s'être accrochés jusqu'au bout) puis la re-descente, à la frontale pour les autres, à la rien du tout pour moi, car évidemment, je l'ai oublié (comme les piles de rechange de l'appareil photo d'ailleurs).

Photo 7 : Vue depuis le sommet, et l'ombre du pico de Teide qui se projette vers l'est, au couchant, au dessus de la caldeira.



La soirée au refuge est douce, accompagnée par la lune orange qui se lève. Là aussi, le spectacle est beau et gratuit. Alors, finalement, je décide que le lendemain, je remonterai pour voir le levé du soleil. Tout seul car personne ne veut m'accompagner. Je suis resté séduit par le spectacle du soir.
Je me couche, mais je dors mal car je suis, en fait, complètement excité. Dans le noir, Claire se lève pour aller aux toilettes:
- Quelle heure est-il? (inutile de vous demander ce que j'ai fait du réveil?)
- Je ne sais pas...
Je me tourne et me rendors pas. J'écoute les bruits du dortoir et attend 5h45 que le portable de Claire sonne. Je tourne, me retourne, ne tenant plus en place. Certains randonneurs se lèvent et se préparent, discrètement. Je fais comme eux, car rester au lit ne me sert à rien, en avalant deux chocolats chauds. Je suis obligé de réveiller Claire pour lui dire d'éteindre son portable... Croisant les deux gardiens du refuge, à l'extérieur sur la terrasse:
- Vous savez à quelle heure, le jour vient? (en espagnol, donc la traduction est littérale...)
- Vers sept heure quinze.
- Ah, et le soleil, il vient à quelle heure?
- Pas avant 8h10.
- Ah, bon pas avant?
J'en ai pour à peine une heure de montée. Il est 5h50. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire en attendant? Il faut partir quand même et léger, car le sac est resté au refuge. Je fonce. Effectivement, le sommet est là rapidement, à peine une heure, d'autant plus que la lune m'éclaire tout du long. J'attends, en tenue légère, puis au bout de cinq minutes, m'habille chaudement, car en fait il gèle (au sens premier du terme!). Je fais le planton en regardant la constellation du littoral urbanisé illuminé. Petit à petit, tout le monde arrive au sommet et à l'heure fatidique, nous pouvons tous observer l'ombre du sommet qui se projette à nouveau, cette fois-ci vers l'ouest dans des tons rose et bleu. Les îles autour sont bien là: Gran Canaria, plein est, et à l'ouest, Gomera, Hierro et La Palma dont les sommets dépassent des nuages. La fatigue s'est effacée et le géographe qui sommeille en moi, jubile, c'est peu de le dire.

Photo 8 : Vue depuis le sommet. A gauche, l'île de Gomera, à droite la projection de l'ombre du pico vers l'ouest, au levant.