mardi 14 février 2017

Une traversée de la Margeride (Lozère) en ski de randonnée nordique.

Nous avons traversé en ski de randonnée nordique le massif granitique de la Margeride, situé principalement en Lozère (avec une intrusion en Haute Loire) dans le Massif Central en 3 étapes depuis le petit village de Paulhac en Margeride au nord du massif. Ce village correspond à l'arrivée de la première étape de la traversée classique qui comporte donc 4 étapes. Celle au départ des environs de Ruynes en Margeride, non loin de Saint-Flour, nous ne l'avons donc pas parcouru. Nous n'avions pas le temps simplement. Mais elle mérite aussi qu'on s'y attarde passant notamment au Mont Mouchet (1496m), important maquis pendant la Seconde Guerre mondiale.

Photo 1: On est bien seul par ici.
 L'ensemble du parcours se déroule globalement sur la ligne de crête séparant les lignes de partage des eaux des bassins versants de l'Allier (donc la Loire) à l'est et de la Truyère/Lot (donc la Garonne) à l'ouest. C'est un massif d'aspect débonnaire, avec de lourdes croupes dont l'altitude moyenne de sa ligne de faîte, assez régulière, se situe à plus de 1400 mètres. La partie méridionale se relève pour accéder au point culminant le Truc de Fortunio, 1552 mètres, avant de redescendre dans la dépression du lac de Charpal vers 1300 mètres. Mais on domine cependant les plaines alentours.
 Les paysages se partagent entre de vastes domaines forestiers de l'ONF composés d'épicéas, de formations plus naturelles et plus rares de hêtres (dans les zones plus humides) ou pins sylvestres. Face à ces zones forestières, on retrouve de la lande à genêts ou bruyères, souvent clôturées pour l'élevage. Sur certains sommets (les trucs), la présence du granite se matérialise par des chaos de rochers dégagés par l'érosion, semblable à ce qu'on peut trouver dans certains massifs du centre de l'Allemagne, car il n'y a pas, de manière surprenante, de trace d'érosion glaciaire dans le massif.
Alors en lisant tout cela, on peut se dire que l'on part dans un massif sauvage, bien que ses paysages soient très humanisés, avec une densité de population assez faible. Pour tout dire,  c'est un peu ce que nous recherchions. Cela n'empêche pas de trouver des lieux pour être hébergé et construire son itinéraire de manière aisée même si on peut faire de longues étapes.

Photo 2 : Nous avons donc remonté cette vallée, le premier jour. Au fond, à gauche, qu'on ne voit pas, le village de Paulhac en Margeride, au pied du Mont Mouchet.
  La première de ces étapes fut donc pour nous au départ de Paulhac en Margeride, où nous avons dormi à l'auberge Le bon accueil qui porte bien son nom. Avec moins de 50 euros par personne, nous avons eu la chambre pour deux avec le repas copieux du soir (avec notamment une délicieuse omelette baveuse au jambon de pays et de la saucisse maison...), le petit déjeuner. L'arrivée s'établit dans le gîte rural Le Sauvage dans une ancienne abbaye. Le lieu porte un nom inspiré, ce qui n'empêche pas là aussi le bon accueil. L'itinéraire a été assez sinueux dans le sens où il a fallut tout d'abord trouver l'enneigement nécessaire à la sortie du village pour rejoindre l'itinéraire après le hameau de la vachellerie, à travers les près.
Photo 3 : Depuis les ruines de la chapelle de ..., vue sur les burons sur le versant d'en face.
 L'usage de la carte topographique reste fort utile pour rejoindre la route D48 que l'on coupe avant d'emprunter la piste qui nous mènera vers le pied du versant est du Truc de la Garde (1486m) dont nous ferons l'ascension, et puis bis répétita avec la carte pour rejoindre la chapelle Saint Roch sur le route D587. Les cartes sont de toute façon aussi utiles pour connaître les noms des lieux et se rendre compte de la dureté des conditions climatiques (qui n'ont presque rien à envier au Jura).
Photo 4 : Depuis l'antécime (terme adapté??) (1484m) du Truc de la Garde. Celui-ci au fond à gauche le dépasse de 2 mètres. Pour joindre l'un à l'autre, nous avons suivi la limite de la forêt que nous voyons, par la gauche.

Photo 5 : Peu après la chapelle Saint Roch (où il y a un refuge ouvert) sur le bord de la route départementale.
Photo 6 : L'arrivée au Sauvage. Il n'y a pas de service de restauration mais ils vendent de quoi manger, des produits de fermes des alentours (dont de bonnes soupes, fromages, saucissons...). Nous étions que tous les deux, comme tout le temps d'ailleurs, et le gîte est franchement confortable.
 L'usage des différentes cartes topographiques nous a paru indispensable et en même temps, il fallait bien lire le paysage car celui-ci a tendance à se fermer alors si votre carte date un peu, vous trouverez quelques différences.
La longue deuxième étape nous conduira à la très chaleureuse ferme auberge de la famille Amarger dans le hameau du Giraldes sur la commune d'Arzenc de Randon. Ce fut l'étape la plus longue (peut-être plus de 30 km et nous avons skié environ 8 heures), et en ce qui me concerne la plus belle. Depuis Le Sauvage, nous avons suivi des traces de ski qui nous ont fait contourner la réserve de bisons de Sante Eulalie.  (voir photo 7 ci-dessous de bon matin)
Photo 7 : Peu après Le Sauvage.
 Et là aussi, nous avons utilisé la carte topographique (et même la boussole) car jusqu'à ce que nous récupérions le GR, il n'y avait pas de balises.
Photo 8 : Aujourd'hui restaurant, bar... de la station. Cela peut très bien constituer une étape intermédiaire entre Le Sauvage et Le Giraldes.
A partir de ce moment-là, ce fut une formalité, en passant à la station de ski de la Baraque des bouviers, à travers les allées majestueuses d'épicéas couverts de neige, ou alors en bordure de ces mêmes formations forestières, à la limite des landes, laissant voir le paysage qui descendait lentement vers les plaines : ça m'a parut grandiose, d'autant plus que l'on faisait notre propre trace dans le silence et l'ambiance ouatée. Alors, l'arrivée à la ferme fut la gourmandise, devant la grande et belle cheminée de la salle à manger.
Photo 9 : On est là encore sur les pistes de ski de fond de la station. Et c'est vrai qu'avec le damage, et après la pause revigorante au bar (faut pas déconner quand même!), je me suis pris pour Martin Fourcade sans la carabine. C'est que ça filait vite à ce moment là.
Photo 10 : A la ferme, nous n'étions pas les seuls à être bien, là  devant la cheminée...
Enfin, le dernier jour, avec l'ascension du Truc de Fortunio, nous irons jusqu'à la station de ski de fond du plateau du palais du roi, où nous avions laissé une voiture (environ 6 heures de ski). Initialement, l'arrivée était prévue à Laubert, plus bas, sur la RN88 mais le manque de neige nous a obligé à changer. Jusqu'au col du cheval mort, l'itinéraire se fait entièrement sur piste balisée du GR, puis le long de la route qui monte au sommet du truc (le GR s'en écarte 300 mètres avant) où une immense tour de télécommunication trouve finalement sa place, surtout quand celle-ci reste dans les nuages... Nous avons décidé de laisser de côté le sentier balisé qui part vers l'ouest avant de revenir en contre-bas vers le lac, en coupant directement dans le versant et le rejoindre plus bas. Les limites de la parcelle de forêt, bien droite, permettent des points de repères aisés. Nous avons imaginé que depuis le sommet le panorama était vaste mais en ce qui nous concerne cela reste des suppositions...

Photo 11:  Commentaires inutiles...
Photo 12 : Au sommet du truc de Fortunio, avec la table d'orientation à gauche et donc la tour de télécommunication (100 mètres de hauteur, à vérifier) en arrière plan.

Photo 13 : Le dernier versant, en longeant la forêt de gauche. Au fond le lac de retenue de Charpal qui alimente la ville de Mende. L'arrivée est toute proche.
 Alors pour conclure, ce fut une expérience magnifique pour laquelle il faut être cependant en bonne forme physique, avoir une certaine habitude de la montagne et de la lecture des cartes topo (même si mes repères pyrénéens furent quelque peu chahutés parfois). Je n'ai pas fait dans ce récit la description exacte de l'itinéraire car il est bien de laisser à chacun le choix de celui-ci (que les cartes topo permettent à mon sens davantage que les topo-guides, même si on a souvent des balises de GR), et de penser que tout de même, on ne s'y aventurera pas n'importe comment, et avec n'importe qui. Ceci n'est donc pas un guide. Ne pas oublier de s'hydrater régulièrement sur le chemin pour éviter quelques désagréments, même si le froid coupe la soif... Enfin, on aura avec un peu de patience la chance de voir la faune qui semble si riche avec toutes ces traces qui coupaient notre itinéraire. Quelques biches sur la fin, et ...ouf... j'avais l'impression d'être suivi ou devancé en permanence par un vieux loup qui tenait à distance un vieux blaireau...

Simplement, c'était fantastique du début à la fin. Merci G.

Photo 14 : Fonds de carte (1995, un peu ancien...) IGN 1/100000è. La première partie de l'itinéraire jusqu'à la baraque des Bouviers.
En attendant que la neige tombe, on pourra toujours lire le merveilleux livre (sorti en 1989) de Marc Breuil Ski nordique - France Scandinavie Grand Nord dans la collection Les plus belles randonnées aux éditions Denoël dans lequel un chapitre est réservé à la traversée de la Margeride et des Monts Lozère.