dimanche 13 juin 2021

La pique d'Estats (3143m) et le Montcalm (3078m), les sommets de l'Ariège.

 Le massif du Montcalm/Estats, point culminant de l'Ariège et de la Catalogne espagnole, avec ses 3143m d'altitude, est relativement isolé des autres grands massifs pyrénéens. C'est le premier à dépasser les 3000 mètres en venant de la Méditerranée et il faut parcourir une trentaine de kilomètres de plus vers l'ouest pour trouver les suivants. De forme assez compacte, sa prééminence nette sur les autres montagnes environnantes permet d'observer un panorama vaste qui court du Canigou au pic du Midi de Bigorre en passant par les montagnes d'Andorre mais aussi probablement sur la montagne Noire (mais invisible ce jour). Son ascension, sans escalade, ni glacier, est longue et assez pentue, sans trop de répit jusqu'au refuge du Pinet à 2240 mètres d'altitude qui permet de faire une pause sur le chemin des sommets. En effet, 35 minutes séparent la pique d'Estats de son voisin le Montcalm alors l'ascension combine souvent les deux. On y ajoutera le pic Verdaguer 3131m, sommet secondaire, presque une antécime de la pique. À bien y regarder d'ailleurs, on se demandera alors pourquoi la Punta Gabarro, du nom d'un alpiniste espagnol qui trouva une nouvelle voie d'ascension pour la pique d'Estats, n'est elle pas aussi un sommet principal de la liste officielle des sommets de plus de 3000 mètres des Pyrénées? Le pic du Port de Sullo (3072m) plus excentré mérite une ascension à lui tout seul, même s'il serait envisageable de l'ajouter.

Photo 1 : Depuis le sommet plat du Montcalm: de gauche à droite, la triplette de 3000 (Punta Gabarro 3115m Pique d'Estats 3143m et pic Verdaguer 3129m), puis le pic du Port de Sullo (3072m), tout au fond la Maladetta et la crête des pics de Bassiès. La Punta Gabarro est surmontée d'un point géodésique espagnol...

Photo 2: Depuis le pic Verdaguer (du nom du poète espagnol d'expression catalane, une des figures majeures de la Renaixança catalane), vue sur le Montcalm. Derrière celui-ci, le massif de Tabe et le Saint-Barthélémy. Le premier récit de l'ascension du sommet est écrit par Candolle après son ascension du 18 juillet 1807 accompagné du guide Simon Faure. On peut imaginer aisément que ce sommet a été gravi bien avant par des bergers ou des chasseurs d'isards anonymes...

J'étais venu par ici la première fois pour mes 19 ans (il y a fort longtemps), campant à proximité du refuge de Pinet, pour faire l'ascension de mon premier 3000 pyrénéen. Alors cette fois, j'ai décidé d'y amener G. pour son anniversaire. C'est une grosse sortie si on la fait à la journée avec plus de 2000 mètres de dénivellation puisqu'en partant du parking de l'Artigue à 1180 m, si on ajoute le Montcalm, il faut redescendre sur la crête, et le col de Riufret à 2878, qui joint les deux sommets avant de remonter d'une centaine de mètres. Jusqu'au refuge, le cheminement se fait d'abord dans la forêt de hêtre puis déboule sur l'étage sub-alpin et ses pelouses d'altitude parsemées de vieux orris, passant à proximité du charmant étang sourd à 1934 mètres d'altitude. Ensuite, vers 2400m, le sentier passe entre deux gros cairns, et pénétrant dans la haute montagne par une vallée encaissée jusqu'à l'étang d'Estats, coupant déjà les névés tardifs, avant de bifurquer vers l'est et l'étang du Montcalm (2571m). À partir de là, le paysage s'ouvre jusqu'au sommet, et le reste du parcours n'est que champs de neige, passant sur le dernier petit lac à plus de 2800 mètres, complètement couvert, sans pour autant mettre les crampons. On aurait presque pu y skier, en tout cas, on en a eu envie...

Photo 3 : L'étang sourd à 1934m d'altitude. On ira en redescendant.
Photo 4 : Le premier étang en remontant après le refuge, l'étang d'Estats, en contrebas de l'itinéraire d'ascension

Photo 5 : Vue sur le versant espagnol et les estany d'Estats (le plus haut) et estany de Sottlo (le plus bas), depuis le pic ...  L'altitude de ces étangs se situe vers 2400 mètres et la voie normale espagnole passe par là, en partant de la piste qui aboutit quasiment à 1900 mètres d'altitude au refuge de Vallferrera

Il y avait du monde sur le chemin le samedi, mais au refuge la fréquentation était modeste, puisque hormis un groupe de six, qui ne comptait visiblement pas aller plus haut, le vendredi soir, il n'y avait que nous. Je préfère d'une manière générale toujours monter le vendredi soir pour éviter la cohue du lendemain. Même si on arrive tard, et que bien sûr, j'avais oublié de préciser à G. qu'il fallait prendre du coup de quoi manger le soir; heureusement, après nos "supplications", la gardienne nous a préparé des sandwichs au pâté ... et puis bien sûr, car je suis un parfait organisateur, après le dernier texto à G., "N'oublies pas de prendre ton sac à viande ou ton duvet"... "C'est fait"... j'avais oublié le contexte covid et le fait qu'ils ne fournissent plus les couvertures...  Alors G tu as ton duvet? Ben non...que le sac à viande... Là aussi heureusement, la gardienne nous a trouvé une solution...

Photo 6: Au fond, la ligne de crête du massif des pics de Bassiès domine le versant sud au caractère alpin affirmé. Vue prise depuis le déversoir de l'étang du Pinet, au pied du refuge du même nom.

Le lendemain parmi les randonneurs, nous avons rencontré trois jeunes, des étudiants de sup aéro, qui étaient venus en train depuis Toulouse, jusqu'à Tarascon, puis de là, soit une vingtaine de kilomètres, avaient rejoint le parking avec leurs vélos avec les sac à dos sur le dos... Bien sûr, au retour idem. Alors chapeau, parce qu'en plus ils étaient franchement sympas. Ça fait plaisir.

En lisant, le très intéressant article d'Alain Bourneton, Deux siècles d'ascensions dans le massif Montcalm/Estats, dans le numéro 200 (1999) de la revue Pyrénées, vous pourrez apprendre notamment que le massif possède la particularité de posséder les plus hauts lacs des Pyrénées (vous passerez dessus peut-être même sans vous en apercevoir...) et que sur l'arête sud du pic du Port de Sullo, à 2850 mètres d'altitude, vous trouverez le petit pin à crochet le plus haut des Pyrénées (en 1999)... 

Photo 7: L'itinéraire sur une carte au parking de départ...

Enfin pour conclure, un petit bain dans le torrent à l'Artigue permettra de repartir de bon pied, un peu plus propre... Certaines photos sont de Guillaume.