mercredi 14 décembre 2022

Même au cinéma ... mais pas que les Pyrénées, heureusement...

     En cette fin d'automne, alors que la neige a recouvert les pentes, on aura pu facilement trouver le temps pour aller découvrir trois films dont l'histoire se déroulait en montagne et qui étaient à l'affiche dans les salles obscures toulousaines. Deux se déroulaient dans les Alpes, Les huit montagnes (celui-ci en avant première en fait) et Les Engagés, et un dans les Pyrénées Pétaouchnok. Chacun dans un style et registre différents et au-delà des paysages montagnards mis en scène, faisant une belle vitrine pour les collectivités locales et offices du tourisme locaux qui ont bien compris l'intérêt de soutenir ces réalisations, un fil directeur pouvait être facilement trouvé, celui de valeurs aujourd'hui peut-être bousculées, la fraternité et la solidarité, valeurs que l'on trouvera facilement dans l'imaginaire collectif montagnard.

Photo 1 :  Sur les remparts de la citadelle de Briançon réalisée par Vauban. En arrière plan, un peu flou, et menaçant, ce doit être le Pelvoux...
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    Celle-ci est clairement le fil directeur des Engagés, qui raconte l'histoire de David, un homme vivant à Briançon dans les Hautes-Alpes, dont la vie va être bouleversée par la rencontre avec un jeune migrant africain, un adolescent isolé, qu'il cache après un accident de la circulation. Malgré quelques petites lourdeurs dans le scénario liées à l'histoire personnelle et familiale du héros, la réalité racontée fait référence à l'affaire des 7 de Briançon qui dans un premier temps avaient simplement participé à une manifestation qui dénonçait une action du mouvement d'extrême droite aujourd'hui dissous, Génération identitaire, ces derniers ayant bloqué le col de l'Echelle pour barrer le passage de la frontière. La manifestation à Briançon visait alors à exprimer et dénoncer une militarisation de la frontière et la prolifération des discours de haine et de racisme. Dans cette perspective, la réalisatrice Émilie Frèche profite bien de la topographie pour montrer la réalité peut-être ignorée par une majorité du passage de ces migrants dans une montagne encore dangereuse (car sauvage ?) de part notamment ses rigueurs climatiques hivernales. Par un très beau et intelligent plan panoramique miroir qui oppose d'un côté les zébrures du grand domaine skiable enneigé de la fameuse Serre Chevalier avec derrière le massif des Écrins, et de l'autre, séparé par la vallée de la Guisane, le versant du col de Granon, sous les crêtes de Peyrolles probablement, qui apparait plus isolé et sur lequel se trouve un petit refuge dans lequel, en attendant de pouvoir poursuivre le chemin, s'est réfugié un petit groupe de migrants, elle montre de manière fine et pertinente ces deux mondes qui semblent s'opposer et s'ignorer. Quelques petites libertés plutôt divertissantes sont aussi prises avec la réalité géographique puisque tout le monde sait (ou devrait savoir...) que la route qui monte au col du Lautaret ne nous mènera pas en Italie... Ceux qui connaissent les lieux s'y retrouveront aisément et je reste sur l'impression forte et belle et admirablement bien jouée dans laquelle Benjamin Lavernhe, David dans le film réplique à la fille de son amie qui lui demande à propos de l'engagement : "- Ça sert à quoi en fait? - Ça sert à être solidaire, montrer que la fraternité ça n'est pas juste un mot". Mais aussi d'une partie du discours de Anne, jouée par Catherine Hiegel, lors d'une ces fameuses manifestations : "Dans un monde civilisée, la solidarité ne devrait pas être un délit... " et j'ajouterais peut-être aussi pas seulement une affaire de cordées montagnardes (toujours facile à dire..)... Dernier point, ce film vient nous rappeler aussi qu'en France les montagnes ont toujours été des lieux de passage et de communication pour les humains, et qu'en soi, même en étant des frontières politiques, elles avaient finalement une dimension sauvage assez atténuée...


    Dans Les Huit montagnes de Félix Van Groeningen et Charlotte Vandermeersch, adapté du roman éponyme de Paolo Cognetti, il s'agit plutôt d'une histoire d'amitié profonde entre deux jeunes garçons qui évoluent jusqu'à l'âge adulte. Inspiré du roman, avec la participation technique de l'auteur, le film a pour cadre les magnifiques montagnes du Val d'Aoste italien, les Alpes pennines qui séparent ce dernier du Valais suisse et dans lequel se trouve donc le petit hameau de Graines du roman. Aujourd'hui Paolo Cognetti vit d'ailleurs dans le village de Brusson, commune dans laquelle se trouve le fameux hameau. Ce qui est intéressant dans cette histoire c'est ce que la montagne permet, c'est-à-dire l'histoire d'amitié entre deux enfants isolés car fils uniques, de deux milieux opposés (un petit citadin milanais et le dernier enfant du hameau) et également la découverte du père du narrateur ou héros principal sous un autre aspect en être beaucoup plus attentif avec son fils lorsqu'ils se trouvent ensemble dans les hauteurs. En cela, parce qu'elle agit sur les autres, elle est un personnage. Ce qui est intéressant aussi, et contrairement à ce qu'on peut lire abondamment dans la presse critique, il ne s'agit pas ici forcément de l'appel à la nature. L'histoire se déroule dans un contexte de déprise pastorale et rurale. Dans une scène où Bruno vient à la rencontre des amis citadins de Pietro et une discussion s'engage entre eux sur les beautés et bienfaits de la nature, Bruno rappelle alors que la nature il ne connaît pas et qu'il utilise d'autres mots pour décrire ce qu'il voit et pratique... des prés, des forêts... mais de nature point. On pourra alors reprendre l'article de Francesco Fedele dans le numéro 16 (2002) de la revue L'Alpe, dont le titre iconoclaste est sans équivoque La nature n'existe pas. À défaut d'interpréter cette scène ainsi, voici des réalisateurs qui ne se posent pas dans un paradigme réducteur d'opposition nature culture. En tout cas, je l'ai interprété ainsi, sans qu'il faille renoncer à être respectueux de ce milieu dit naturel. Enfin, bien sûr, l'auteur, héros du film, ... parcourt aussi l'Himalaya (et là aussi la montagne est belle..) mais surtout il en revient  avec cette question des huit montagnes. Je préfère alors à ce niveau reprendre un extrait du texte original du roman, dont le passage est mis en scène à la fin du film: 

"Il me demanda pourquoi je m'intéressais à l'Himalaya. J'avais déjà la réponse toute trouvée à cette question: je lui dis qu'il y avait une montagne sur laquelle j'avais grandi, à laquelle j'étais très attachée, et qu'elle m'avait donné envie de voir les plus belles, à l'autre bout du monde.

"Ah, dit-il. Je vois, tu fais le tour des huit montagnes.

- Quelles huit montagnes?"

    L'homme ramassa un petit bâton avec lequel il fit un cercle dans la terre. Le motif était parfait, on voyait qu'il avait l'habitude de le dessiner. À l'intérieur, il traça un diamètre, puis un deuxième, perpendiculaire au premier, et puis un troisième et un quatrième le long des bissectrices, obtenant ainsi une roue à huit rayons. Je me dis que si j'avais voulu arriver à une figure comme celle-là, je serais parti d'une croix, mais c'était typiquement asiatique de partir d'un cercle.

"Tu as déjà vu ce dessin? me demande-t-il.

-Oui, lui répondis-je. Dans les mandalas.

-Exact, dit-il. Nous disons qu'au centre du monde, il y en a un autre, beaucoup plus haut: le Sumeru. Et autour du Sumeru, il y a huit montagnes et huit mers. C'est le monde pour nous."

Tout en disant ces mots, il traça à l'extérieur de la roue une petite pointe au dessus de chaque rayon, puis une vaguelette d'une pointe à l'autre. Huit montagnes et huit mers. À la fin, il entoura le centre de la roue d'une couronne qui devait, pensai-je, être le sommet enneigé du Sumeru. Il jaugea son travail un instant et secoua la tête, comme s'il avait déjà fait mille fois ce dessin mais avait un peu perdu la main dernièrement. Il planta quand même son bâton au centre, et conclut : "Et nous disons: lequel des deux aura le plus appris? Celui qui aura fait le tour des huit montagnes, ou celui qui sera arrivé au sommet du mont Sumeru?" 


    Nous n'irons pas jusqu'à dire que dans ces huit montagnes se trouveraient les Pyrénées... Dans la comédie Pétaouchnok, ce lieu imaginaire censé se trouver loin, Édouard Deluc nous emmène dans les Pyrénées donc, orientales pour être précis, à la suite d'une bande de randonneurs partie avec une agence de voyage nouvellement montée par deux amis un peu en nécessaire remise en cause... Pour arriver au bout de leur périple semé d'embûches il va falloir faire preuve là aussi de solidarité... Ça ferait un peu les randonneurs dans les Pyrénées, et si parfois, on pourrait avoir envie que nos promeneurs arrivent plus vite, il reste que les acteurs, et Pio Marmaï en tête, jouent bien et on se dit qu'ils ont dû passer de bons moments à tourner ce film et au final, on passe nous aussi un agréable moment. Car il s'agit bien sûr pour ces randonneurs en herbe lors d'un cheminement de plusieurs jours de se découvrir, au sens propre, en se baignant dans les lacs d'altitude (ici on devinera le pour moi si beau lac de Pradeilles...) comme au sens figuré surtout...  À noter qu'en 2009 déjà, dans le film J'ai oublié de te dire,  de L.Vinas-Raymond, avec O.Sharif, quelques scènes de l'histoire du film se déroulent au bord de ce lac. Mais comme toute histoire, ou presque, qui se déroule dans les Pyrénées, il faut que l'ours apparaisse à un moment donné même si on a pu oublier qu'il y en avait eu dans les Alpes aussi (et ailleurs), en Vanoise, jusqu'aux années 20 et que le dernier a été tué dans le Vercors en 1937. Ainsi notre plantigrade est encore le garant principal d'une place encore forte de la nature dans notre massif. D'ailleurs il est présent de manière amusante sur l'affiche du film. Là aussi, voici un formidable outil de communication alors que le film nous montre effectivement de beaux espaces montagnards, étages alpins et sub-alpins et que les connaisseurs reconnaitront forcément à un moment donné les sommets du Carlit, du Péric, les étangs évoqués ci-dessus déjà, les environs des stations de ski des Angles, du lac de retenue de Matemale dans ces Pyrénées catalanes bien mises en scène pour le tourisme.


Photo 3: Je trouve personnellement l'affiche marrante et elle procure l'envie d'aller voir le film en donnant le ton. L'ours toujours là derrière comme une grosse peluche est immanquable dans presque toutes les représentations des Pyrénées...




jeudi 8 décembre 2022

Téléski au Cap des Hittes (2369m) à Peyragudes (31) et la partie supérieure de la vallée blanche accessible (presque) à tous... Pfff...

    Et bien voilà que la partie supérieure de la vallée blanche bien connue des skieurs de randonnée, dans la station de ski de Peyragudes (31), est désormais accessible à (presque) tous puisqu'un téléski à enrouleurs de 400 mètres (le téléski des 1000, parce que 1000 mètres de dénivellation à la descente) a été aménagé sous le sommet du Pène Nère à 2260 mètres et ancien sommet de la station, en contrebas du télésiège, pour arriver au sommet du Cap des Hittes à 2369 mètres d'altitude. Désormais, la réalité correspondra davantage aux annonces publicitaires concernant la station qui annonçaient depuis de nombreuses années une altitude maximale de 2400 mètres...  25 ans après le tournage du film "Demain ne meurt jamais" de la série des James Bond avec P.Brosnan, la station est de nouveau sous le coup des projecteurs... James Bond devait alors infiltrer un camp afghan qui avait été reconstitué sur l'altiport (le site avait d'ailleurs été choisi pour sa présence).

Photo 1: Le fameux téléski... Vue prise depuis un peu en dessous de la station d'arrivée du télésiège de Serre Doumengue. Pour voir comment c'était avant...

    Je ne sais pas si nous devons nous en réjouir (personnellement non) mais il est évident que l'adaptation au changement climatique et à la baisse des quantités de chutes de neige depuis plusieurs années ont poussé la direction de la station à repousser les limites du domaine skiable et à l'agrandir. L'avantage évident est d'accéder à la partie supérieure de la dite vallée blanche qui ces dernières années dans sa partie inférieure n'avait plus grand chose de blanche car les quantités de neige insuffisantes ne permettaient plus assez souvent de pratiquer la descente jusqu'au bout c'est à dire jusqu'au virage de la route en contrebas de la station... Effectivement, l'installation de ce nouvel équipement intervient dans un secteur naturellement bien enneigé.
    
Photo 2: Fini le ski de randonnée en toute tranquillité ...

    Ceci dit, cette partie supérieure ne sera peut-être pas accessible à tous vraiment car il s'agit d'itinéraires de pistes noires autrement dit les plus difficiles... D'après le site officiel de la station cela permettra de "prolonger l'espace desservi aujourd'hui par le télésiège de Serre Dumengue et d'ouvrir un quatrième secteur par le haut. Depuis le point culminant, on profitera de la piste la plus longue du domaine avec 1000 mètres de dénivelé quand les conditions sont optimales." Le téléski "desservira d'un côté une piste noire permettant de rejoindre la piste rouge des Marmottes ou de poursuivre sur la piste noire Pène Nère pour rejoindre le télésiège débrayable Serre Doumengue ou finir la vallée blanche." "De l'autre côté, un espace freeride sera mis en place dans le Val de Montségu. Le secteur sera non damé mais sécurisé, 2 itinéraires seront balisés, de couleur noire, d'environ 3 kilomètres chacun, réservés aux bons skieurs ou surfeurs."

    Dans un article de la Nouvelle République des Pyrénées du 07/12/2022, le directeur de la station précise "qu'il y a peu de stations en France à proposer des extensions de domaine skiable. On est dans une logique vertueuse car on n'a pas terrassé les pistes. On n'a pas installé de réseau de neige de culture. On est sur une recherche équilibrée entre l'extension, l'offre de ski et l'aspect environnemental". L'investissement est de l'ordre de 800 000 euros. 

    En ce jour, les équipes s'affairaient à préparer la saison qui devrait ouvrir le week end prochain, malgré une quantité de neige peu importante... Et pour être honnête, nous étions un peu déçus de trouver ce téléski là...

Photo 3 : Depuis le haut de la station vue sur les crêtes de la vallée d'Oeuil en arrière plan...


Photo 4 : Une partie du plan des pistes de la station prise sur le panneau au sommet du télésiège de Cap de Pales.


jeudi 1 décembre 2022

"La perle des Antilles", un restaurant pour enfin (...) manger haïtien à Toulouse à midi (et le soir)...

 Enfin! Enfin, on peut manger (et bien manger) du griot de porc (ou griyo), du riz djon-djon (ou diri djon-djon), des bananes pesées avec du pickles (pikliz), et autres spécialités haïtiennes, à Toulouse à midi dans un petit restaurant agréable et accueillant, La perle des Antilles, que l'on pourra aussi considérer comme une cantine. Il suffira de regarder la carte des plats, des salades et des coupe-faim ou encore mieux d'y aller, car il a ouvert il y a un mois, pour se rendre compte qu'Haïti est un pays où l'on mange bien.

Situé 2 place Antonin Froidure, sous les arcades, à l'entrée sud du parc de la Maourine (ligne 36 du bus), dans le nord de Toulouse, à 15 mn à pied de Borderouge, vous serez accueillis chaleureusement et avec le sourire par la patronne avec un drapeau haïtien au dessus du comptoir et une belle plage de sable et ses cocotiers en fond comme décor sur le mur. 


On peut bien sûr commander à emporter ou consommer sur place. Avec les beaux jours, il sera possible de mettre des tables sur la place ou d'aller manger dans le parc juste en face. Se retrouvent alors immanquablement les saveurs de là-bas et les bananes pesées, craquantes, et pas grasses et la sauce qui va avec. Rien que pour elles on pourra revenir... Enfin, de pouvoir manger comme cela, rappelle le pays, dans lequel il est malheureusement aujourd'hui peu conseillé de se rendre, où les petites cantines donnent une partie de la saveur au pays. Mes compagnons du jour qui avaient pris des légumes haïtiens au boeuf avec du riz collé (diri kole) ne me contrediront pas, hein ... ? La patronne nous a même fait goûter du cabri...

Voilà, il faut y revenir avec ses proches... En attendant on écoutera Tabou Combo


Photo 2: Le fameux griyo ak diri djon-djon pikle et bananes pesées

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