mardi 24 octobre 2023

Le film "Monsieur Le Maire" en avant-première à L'Hospitalet-près-L'Andorre.

     Hier soir, en ce mardi 23 octobre 2023, à la salle des fêtes Robert Diaz de L'Hospitalet près l'Andorre, les rangs étaient serrés pour assister à l'avant première du film Monsieur Le Maire. Il y avait bien plus d'une centaine de spectateurs. Le film raconte l'histoire de Paul Barral, maire d'un petit village de montagne au pied du Mont-Blanc, qui "se bat pour maintenir les commerces et préserver l'école d'une fermeture annoncée. Alors qu'il cherche désespérément comment attirer de nouvelles familles, l'arrivée de mères célibataires en situation difficile dont Joe-Lynn, chanteuse au franc-parler et ses deux enfants, va vite faire des étincelles dans ce village paisible. Non sans détermination, Monsieur Le Maire a peut-être trouvé là une solution inédite pour amener de la vie dans un territoire à l'abandon..." (Allocine.fr). Plus que la localisation de l'histoire du film, c'est l'histoire en elle-même qui a probablement attiré les spectateurs et justifié cette belle soirée de cinéma. En effet, celle-ci s'inspire librement mais directement, comme c'est écrit à la fin du générique, de l'élaboration du projet de La maison des Cimes dans la commune, à L'Hospitalet-près-l'Andorre, qui accueille depuis 2020 des mères isolées avec leurs enfants, et qui donc bénéficie à l'école primaire publique du village. Où quand la solidarité n'est pas qu'un mot, il s'agit ici d'une réelle innovation sociale dans un contexte de déprise démographique. Pour ceux qui voudront aller plus loin, le film-documentaire La maison des cimes de Johanna Bedeau apportera peut-être plus de réponses. Mais le film, pour reprendre les mots du maire de L'Hospitalet-près-l'Andorre, ne trahit pas le projet.

Photo 1: L'affiche à l'intérieur de la salle...

    Il est évident que l'on passe un bon moment en regardant ce film, film grand public avec dans le rôle principal Clovis Cornilhac que j'ai trouvé, en ce qui me concerne, tout à fait convaincant, mais comme tous les autres acteurs d'ailleurs d'une manière générale. Si l'histoire se déroule dans les Alpes, et non dans les Pyrénées, c'est en l'occurrence un choix des réalisateurs, qui le voulait clairement, étant originaire l'une de la région grenobloise et l'autre de Bourg Saint-Maurice, mais tous les eux, l'ont-ils bien rappelé issus de milieux ruraux. Les paysages du massif du Mont-Blanc feront parfois un peu carte postale pour office du tourisme savoyard, mais ils restent magnifiques et bien sûr cela donne envie d'aller y passer des vacances, au milieu des chalets en bois et des espaces alpestres. Surtout, la thématique du rôle des maires des petites communes dépasse bien entendu ces limites-là. Il s'agit en effet, d'un des rouages essentiels à notre démocratie et un cadre d'expression probablement privilégié à celle-ci. Fabien Conord dans Les espaces ruraux français: une géopolitique en mutation (dans Les espaces ruraux en France, dirigé par L.Rieutort en 2018) dit bien en effet que "la sociologie des maires ruraux illustre deux différences par rapport aux moyennes nationales. Elle révèle la participation non négligeable des classes populaires à la gestion des affaires publiques et la surreprésentation des agriculteurs." Même si dans le film la commune regroupe plus de 400 habitants ce qui n'est pas si mal en soi, il faut relever qu'en France pour les très petites communes, celles de moins de 50 habitants (et L'Hospitalet près l'Andorre c'est un peu plus de 80 habitants), les ouvriers et employés constituaient environ 18% des maires (contre une moyenne nationale de 8 et quelques). De même, les femmes en constituaient presque 20% contre 14 au niveau national. (cf J.B.Grison La très petite commune en France. Héritage sans avenir ou modèle original?, 2009). 

    Ainsi donc, à l'heure où la tendance est aux regroupements de structures, et parfois au dépouillement ou à la dilution des prérogatives des maires, au profit des communautés de communes aux profils divers et variés notamment, il est bon de rappeler le rôle majeur des maires de ces communes rurales. De rappeler également que ces maires, accompagnés de leur équipe (sans oublier le rôle pertinent des secrétaires de Mairie, bien mis en scène dans le film) très souvent avec un engagement important sont capables de faire beaucoup, pour peu que l'État centralisateur leur en laisse les moyens. Le film vient à propos et de belle manière rappeler tout ça.

    

vendredi 6 octobre 2023

Leçon d'alpinisme au pic occidental des Crabioules (3106m)

     Le pic Occidental des Crabioules (3106m) n'est vraiment pas loin du refuge du Portillon-Jean Arlaud, moins de 600 mètres de dénivellation, il n'y a qu'à remonter le vallon du col inférieur de Literole (2983m). En deux heures, on est au sommet de cette crête effilée car la dernière partie avec l'accès à la brèche Mamy, en bifurquant juste en dessous du fameux col, sur une moraine persistante, puis la partie terminale vers le sommet est finalement beaucoup moins facile qu'envisagée, nécessitant, mais c'est relatif, en ce qui me concerne, d'être encordé. Pour être honnête, je n'y ai pas été à l'aise, probablement un peu parce que la veille, j'avais atteint un objectif et que je n'aime pas enchaîner les sommets. Je préfère simplement avoir le temps de digérer une ascension, ne serait-ce qu'au moins quelques jours, pour être émotionnellement au point. Sinon honnêtement, je n'arrive pas à me mobiliser. C'est ce qu'il s'est passé ce jour-là, car l'objectif était de poursuivre avec le pic oriental des Crabioules (3116m), mais une fois arrivé au sommet, après une discussion avec N. mon guide, qui avait bien remarqué dès la veille au retour mes lenteurs, et après avoir bien observé la suite engagée du cheminement sur la crête, et constaté mes difficultés pour monter là alors que ce n'était pas plus difficile que le pic Jean Arlaud de la veille, j'ai préféré renoncer. Ce sera pour une autre fois.

Photo 1 : Depuis le sommet du pic Occidental des Crabioules vue sur le pic Oriental... Ce sera donc pour la prochaine fois... Le Maupas est derrière et les montagnes du Couserans sont au fond à gauche.

    L'ambiance, ce jour-là, était bien différente de la veille, car l'affluence en ce dimanche matin était forte, puisqu'il y avait énormément de monde sur tous les sommets et cols du secteur, du pic de Perdiguère à la crête de Crabioules-Lézat. Il fallait bien déverser les quatre vingt personnes qui avaient dormi au refuge le samedi soir (ils étaient environ 70 à y manger dans un brouhaha parfois assourdissant, malgré les discussions d'alpinistes intéressantes, qui contrastait avec le calme si charmant de la veille) et que pour certains nous entendions clairement claironner. Ainsi, on a beau être dans la nature, en haute montagne, il n'en reste pas moins qu'on peut se retrouver dans une situation de presque tourisme de masse qui nous oblige à relativiser. Je suis donc simplement content d'être monté là-haut, où nous étions finalement seuls, et d'avoir pu admirer la magnifique vue plongeante sur le versant méridional espagnol, son lac de Literole et les petits étangs connexes ainsi que le petit étang sur le versant français du col inférieur de Literole qui se dégage à cause du réchauffement climatique et dont on voit bien, tout proche, les morceaux de glace protégés par les éboulis, ce qui ressemble bien à un glacier noir. En tout cas, ce sommet qui se trouve sur la crête franco-espagnole et sur la ligne de partage des eaux, porte un nom qui en patois local (gascon) signifierait petites chèvres, territoire à isard. En fait, le nom a été donné à ce pic par le Pyrénéisme du 19ème siècle qui baptisait les sommets de plus de 3000 mètres du massif. Celui-ci a été baptisé en fonction du pâturage des Crabioules sur le versant nord, autrefois dominé par le glacier du même nom qui a récemment disparu.

Photo 2: Vue depuis le sommet sur le lac de Literole (le grand). la massif de l'Aneto est au fond à gauche (donc à l'est)

Photo 3 : Le petit étang sous le col inférieur de Literole versant français...


    Du coup, la descente sera plus tranquille et permettra de rejoindre le lac d'Oô puis les Granges d'Astau et constater que la fréquentation est aussi dans le fond de la vallée, deux milles mètres plus bas.

Photo 4 : La brèche Mamy...Le pic est à droite...


Photo 5: Au menu... le refuge du Portillon


lundi 2 octobre 2023

Le pic Jean Arlaud (3065m) et le pic des Gourgs-blancs (3129m) depuis le refuge du Portillon (et avec un guide de haute montagne)

     Le pyrénéiste Jean Arlaud a perdu la vie sur les crêtes du Pic des Gourgs Blancs le 24 juillet 1938 et une plaque commémorative a été élevée au sommet en son honneur. Un sommet voisin, tout juste à l'est, le pic du port d'Oô sera d'ailleurs baptisé pic Jean Arlaud (3065m) en 1953 et le refuge du Portillon tout en haut de la vallée d'Oô porte aussi le double nom Jean Arlaud. Ainsi on trouvera ce lien pour cette double ascension qui m'a paru engagée et pour laquelle clairement j'avais besoin d'un guide pour me monter là-haut et me ramener vivant! Jusqu'au Port d'Oô à la base est du pic Jean Arlaud, depuis le refuge du Portillon, il n'y a pas vraiment de difficulté si ce n'est le cheminement dans les éboulis des moraines qui marquent le si net et terrible recul des glaciers pyrénéens. On devra parcourir d'abord les 4h30 annoncées pour atteindre le refuge depuis le parking des Granges d'Astau (1140m) la veille, afin de partir à l'aube (pas trop tôt en cette saison) de ce samedi 30 septembre pour cette course d'altitude. Du refuge, il faudra rejoindre le col du pluviomètre vers l'ouest, sous la tusse de Montarqué, en croisant en cette matinée, deux isards, par la Haute Route Pyrénéenne, en surplombant le lac Glacé puis donc aboutir au Port d'Oô à 2904 mètres d'altitude en environ deux heures de temps. Au passage, on prendra note de la quasi disparition de la partie ouest du glacier du Seil de la Baque dont il ne reste qu'une faible superficie accrochée sous le cap du même nom... 

Photo 1 : Depuis le col, vue sur le pic Jean Arlaud (3065m) puis juste derrière le pic des Gourgs-blancs (3129m). À gauche, le port d'Oô (2904m) et à droite celui des Gourgs-blancs (2877m) par où passe la HRP. Vue depuis juste après le col du pluviomètre en allant vers l'ouest.

    À partir de là débute la course de crête qui permettra d'enchaîner les deux sommets qui sont séparés par une brèche à 3027 mètres d'altitude. Il faut alors s'élancer encordés dans la face est en allant chercher par des petites vires vers la droite en montant une cheminée qui permettra de s'élever vers la partie supérieure de la face dont on escaladera le dernier tronçon par un itinéraire en écharpe beaucoup plus accessible et qui débouche sur la crête finale. Du sommet, on se rendra compte que la partie finale du sommet des Gourgs blancs, juste en face, a l'air facile mais avant cela il faut descendre en des-escaladant vers la fameuse brèche, peut-être en posant un rappel. Effectivement la remontée est simple, de la quasi randonnée. Mais une fois sur la crête, lorsqu'on poursuit vers l'ouest, après le cairn sommital, cela devient à nouveau engagé avec une longue succession de vires, cheminées et autres lieux assez vertigineux dans laquelle j'ai laissé beaucoup d'énergie, tout en me laissant complètement guider pour finalement rejoindre le col de Gias dans la direction du pic de Clarabide, point le plus occidental de l'itinéraire, duquel il va falloir désormais revenir. Pour cela on redescendra par l'itinéraire espagnol vers le beau lac de Gias (2636m) sans cependant complètement l'atteindre pour remonter à nouveau vers le port d'Oô et reprendre l'itinéraire de l'aller. Cette descente m'aura permis d'observer les autres itinéraires présentés dans les divers topo-guides utilisés pour préparer la sortie, notamment le fameux Pyrénées, Guide des 3000 mètres de Luis Alejos, qui rejoignent la brèche entre les deux sommets, tout deux sur la frontière franco-espagnole, et se dire que vraiment ce n'est pas simple ni à trouver, ni à parcourir... Ceci-dit il faut toujours se méfier de ce que l'on peut voir de loin sur un versant, et à cela il vaut mieux préférer ce qu'on constate concrètement sur place même si cela n'est pas toujours simple... Certains vous diront que finalement l'itinéraire que nous avons utilisé semble être le plus propre. Il l'est d'autant plus que l'ancienne voie normale du pic des Gourgs-blancs qui passait par le glacier du versant nord est aujourd'hui quasiment plus utilisée du fait de la disparition du glacier qui laisse une longue parois raide. En tout cas, comme je ne suis clairement pas un alpiniste, cette description de la journée et de son itinéraire n'est absolument pas à prendre en compte comme un topo-guide et chacun prend ses responsabilités de manière individuelle pour trouver son itinéraire. Étant donné la position centrale du massif au coeur des Pyrénées, le panorama sur les grands sommets mais aussi les plaines au nord, ainsi que certains petits massifs, au nord comme au sud, est assez vaste. 

Photo 2 : En montant vers le sommet du pic des Gourgs-blancs, en se retournant, vue sur le lac glacé avec en arrière plan sur le pic Quayrat et au devant la face est du pic Jean Arlaud en redescendant vers la fameuse brèche (3022m)


Photo 3 : Avec vue plongeante sur le chemin parcouru dans la face du pic Jean Arlaud puis en contre-bas, l'itinéraire de la marche d'approche qui passe par le contrefort de la moraine de l'ancien glacier du port d'Oô. Au fond le lac Glacé est dominé par la Tusse de Montarqué. On trouve le col du pluviomètre à droite. Ce pluviomètre se trouvant sur le petit sommet juste à droite de la tusse, d'où le nom qui a été donné au col.


Photo 4 : En s'approchant au plus près du lac de Gias. Au fond, à gauche, qui dépasse à peine, on trouvera le pic d'Aneto.

    En tout cas, cette ascension du Pic Jean Arlaud m'aura laissé un souvenir vif car lors de la marche d'approche, tout en me disant que N. mon guide de toute façon, allait m'aider à monter là-haut (et me redescendre), je me suis demandé tout de même longtemps par où il allait passer, tant ce sommet en forme de canine a une forme imposante. 

    Le fameux Jean Arlaud, savoyard d'origine, qui a découvert les Pyrénées lors de ses études de médecine à Toulouse, est enterré au cimetière de Gavarnie dans le carré des Pyrénéistes. Le nouveau baptême de ce sommet a pris du temps au cours du 20 ème siècle et il faut aussi avoir en tête que du côté espagnol celui-ci a gardé son appellation d'origine. Côté français, la double appellation sur le site officiel de l'IGN reste de mise même si l'appellation Jean Arlaud a été entérinée à la fin des années 50 mais pendant longtemps, au 19ème siècle, il y a eu confusion chez certains entre les sommets pour l'appellation du pic du port d'Oô que le pic des Gourgs-blancs possédait aussi. En ce qui concerne les Gourgs blancs, le premier terme signifie lac profond en patois local. Et blanc, car l'eau des lacs des Gourgs blancs offrait un aspect laiteux. Pour aller plus loin, on peut lire l'article de Francisco Termenon et Robert Aumard Histoire d'une montagne, les Gourgs-blancs dans la revue Pyrénées de janvier 2010 (n°241).

Photo 5 : Sur la crête sommitale du pic des Gourgs-blancs dont le sommet est au fond surmonté du fameux cairn. À l'horizon, juste à gauche du fameux cairn, le pic Schrader ou Bachimala, à droite, enneigé au loin, le massif du Vignemale. Au milieu de la double barre du pied de la croix, s'intercale le Pic Long puis à droite, les crêtes du Néouvielle.

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    En redescendant, on pourra tout de même admirer le lac d'Oô et comparer avec le tableau observé au musée des Augustins.