mardi 20 septembre 2022

Le pic Pédrous (2842m) par les étangs Moulsut et la vallée des Bésines...

     Le pic (ou puig) Pédrous (ou puig pedros en catalan) qui domine l'étang des Bésines (1970m) est le plus haut sommet de cette vallée et un des plus hauts de la haute vallée de l'Ariège. Sa face ouest, qui domine directement l'étang de plus de 800 mètres, est même assez impressionnante avec ses rochers de granit et ses couloirs assez austères. D'ailleurs son nom en catalan, (d'après le lexique de Joan Becat) viendrait de la racine pedra, c'est à dire pierre, dérivé signifiant donc lieux pierreux. Pourtant un itinéraire permet de le gravir en le contournant pour en faire l'ascension très simple, mais un peu longue, par versant est, celui qui donne sur l'étang du Lanoux. Cet itinéraire, au départ de l'Hospitalet près l'Andorre, est donc assez long (au moins 4 heures et trente minutes pour monter au sommet sans trop perdre de temps) mais après être sorti du bois long qui précède et accompagne l'étang des Bésines, on entre sur la zone pastorale, passant devant la jasse du pla, puis celle plus haut des Bésineilles (sous le pic du même nom) et un paysage qui se radoucit car à partir de ce moment-là la face est apparait bien visible comme la ligne de crête que l'on sait être douce depuis le col que l'on doit y rejoindre. Une jasse est une clairière pastorale non clôturée où l'on rassemblait les troupeaux commun pour la nuit. On aura laissé à gauche le vallon de la Coume d'Agnel. Le versant monte en pente plutôt douce et par palier le long des anciennes moraines dont certaines sont peuplées de pins à crochets avant le redressement final vers le col sur la crête à 2488 mètres d'altitude. Les teintes jaunes des pelouses et du gispet un peu desséché se mêlent au rougeoyant des champs de myrtilliers qui s'enflamment peut-être un peu tôt dans la saison et au vert qui entoure le réseau hydrographique. En montant vers cette ligne qui ferme l'horizon, en suivant les balises rouge et or du sentier de randonnée, on passera non loin des deux si jolis étangs de Moulsut (à 2210 m, de 0,8 et 0,3 hectare avec environ 5 mètres de profondeur pour le plus grand) que l'on dominera et dont on déclinera les nuances de bleu au fur et à mesure de la montée. Sur cette crête, l'itinéraire est cairné sur un sentier assez visible jusqu'au pied de l'ultime montée. Au retour en passant devant les étangs, on ira peut-être même y prendre un bain en tenue d'Adam puisqu'on s'y trouvera seul... 

Photo 1 : Vue depuis la crête sur le pic Pédrous à gauche, les étangs de Moulsut au centre et le pic d'Auriol à droite... L'étang des Bésines (d'environ 7 hectares de superficie, dont l'étang d'origine réputé poissonneux a été surélevé par un barrage) est dans le creux à droite.

Photo 2 : Sous la ligne de crête, au pied également du pic des Bésineilles, le petit étang, peu profond, sans nom où l'on arrive vite depuis la porteille en redescendant...

Photo 3 : Les étangs de Moulsut.

    Si le bas de la vallée, et donc la première partie de l'itinéraire, est assez fréquenté (et on évitera de trop penser aux multiples mouchoirs en papier qui jalonnaient le sentier, et même une couche planquée sous un rocher...), jusqu'au refuge des Bésines en particulier, et même un peu plus haut, sur la crête, c'est probablement vous qui serez l'usurpateur vu le nombre d'isards que vous aurez pu voir défiler, qui croiseront votre chemin en ce jour pour aller se réfugier dans le versant assez raide sous la crête, dans le cirque du Pédrous. Peut-être, par vagues successives, une trentaine... et je me demande d'ailleurs si je n'ai pas vu un mouflon également. Il ne restait alors plus qu'à gravir les dernières centaines de mètres pour arriver au sommet, parfois en s'aidant un peu des mains (mais pas trop ...) et bénéficier du beau panorama. À choisir, on prendra d'ailleurs le sommet sud qui semble bien, en contradiction avec certaines cartes, le plus haut par rapport au sommet nord... J'étais assez content ceci dit, mon orgueil un peu flatté car j'étais là enfin sur le dernier sommet qu'il me restait à gravir dans tout le secteur de l'Hospitalet. Je pouvais désormais tranquillement observer le pic Carlit qui était juste en face, au dessus de l'immense retenue du Lanoux (2,5 km de longueur) qui, elle, avait perdu tant d'eau. Regarder également le pic Péric, en constatant un peu déçu que le Canigou est hors de vue. Tant pis, on se retourne alors pour apprécier vers l'ouest et le massif du Montcalm et puis vers les Besiberris. Au nord ce sera la montagne de Tabe et les carrières de talc... Mais plus loin, encore, vers le piémont, cette fois-ci, c'est bouché. J'étais seul et j'étais pas mal...

Photo 4: L'étang du Lanoux est le barrage de retenue le plus grand des Pyrénées. Ce dernier est venu surélevé un grand étang déjà pré-existant et déjà le plus grand étang de la chaîne. Le pic Carlit en arrière plan domine la ligne de crête. On retrouve sur ce versant les formes plus douces du relief qui pour moi caractérisent ces Pyrénées catalanes.

Ceci dit, ce qui m'a quand même étonné en cette saison, dans la montée vers les Bésines, puis dans le bois long, c'est de voir encore des rhododendrons en fleur... Comme si après la période de sècheresse, la végétation repartait pour une nouvelle saison...

Photo 5: Vue sur la partie finale de l'ascension, depuis la crête du cirque de Pédrous, avec le sommet du pic pedrous sud à gauche et le nord à droite.


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dimanche 11 septembre 2022

La Tose du Siscaro (2818m) sur la Soulane d'Andorre et re-descente par la vallée et l'étang du Sisca en haute Ariège (09).

    Au départ de l'Hospitalet près l'Andorre (09), et sa pratique gare SNCF et son accueillant gîte d'étape (où on ira au moins boire un verre au retour sur l'agréable terrasse), il est possible de marcher sur un long itinéraire, aérien au sens de "on est au dessus de beaucoup de choses", transfrontalier (à cheval entre la France et l'Andorre) et qui permet d'admirer de nombreux lacs plus ou moins grands et de terminer en beauté par la vallée du Sisca pour redescendre au village. L'itinéraire, bien que ne comportant pas de difficultés techniques, est assez long (dénivellation d'environ 1600m) et nécessitera au moins entre 6 et 7 heures de marche pour ceux qui ont un bon rythme. Mais la beauté du panorama sur les montagnes d'Andorre, de Cerdagne et de Haute Ariège (jusqu'au massif du Montcalm clairement distingué à l'ouest) bien visible tant qu'on est sur les hauteurs et les nombreux lacs en contrebas est le principal intérêt de cet itinéraire qui n'est balisé que sur une partie. J'avoue que cela aussi est un des atouts car sur la portion sur la crête et la descente sur l'étang du Sisca, à part par quelques marmottes et autres lagopèdes, vous ne serez pas dérangés par grand monde, même si la vue sur la haute vallée de l'Ariège nous offre l'ennuyeux spectacle de ceux qui bravent la circulation pour monter au Pas de la Case...

Photo 1: Impossible de se lasser de cette vue depuis la ligne de crête sur l'étang des Clots (2331m). Au fond, à droite, le Pas de la Case, au milieu le poste frontière et à gauche les mines du Puymorens dans le versant du pic éponyme. Je cite ci-dessous l'article du lexique du catalan Joan Bequat (et son formidable travail): "un clot est un trou ou un creux, que ce soit dans un chemin, dans un champ ou par métaphore, dans une montagne. Il s'agit alors de vallons ou d'ensellements (Clot del Bosc...), parfois de bassins de réception torrentiels. En haute montagne, où abondent ces lieux-dits, les clots sont alors des cirques glaciaires perchés, de petite dimension ou de taille moyenne, aux formes toujours vigoureuses, en demi-bol ou en entonnoir, ou bien de petites cuvettes de surcreusement dans un grand cirque ou dans une plateforme d'érosion glaciaire. Clota, clotada, clotàs désignent des petits clots." 

Photo 2: Le pic de la Cabanette, vue depuis le moment (pratiquement) où l'on bascule vers la vallée du Sisca à gauche en contre-bas. En fait j'aime bien ces montagnes d'influence méditerranéenne...

    L'itinéraire part donc du village et remonte la vallée du Sisca. Un peu avant le barrage du Sisca, il faut prendre un sentier balisé vers la gauche qui remonte le versant, bien visible sur la partie supérieure en travers, pour atteindre le col des Clots à 2142 m. À partir de là, il suffit de suivre la crête par une vague sente, ni balisée ni cairnée, jusqu'aux sommets de la crête (Roc Melé 2811m, Pic de la Cabanette 2843m, et notre Tose du Siscaro 2818m). Sur ce dernier sommet, on bifurque, toujours sur la crête, vers le nord, où lorsqu'on approche le premier petit pic rocheux, on pourra basculer simplement sur la droite (à l'ouest) dans le vaste cirque pastoral, par de vagues sentiers de brebis pour atteindre le bel étang du Sisca à travers des étendues pastorales... À partir de l'étang on regagne des contrées plus "civilisées" et balisées. Il suffit alors de descendre la vallée.

Photo 3: L'estany (étang en catalan) del Siscaro (ou de Baix), à 2355m d'altitude, à droite, d'une superficie d'environ un hectare est voisin de l'estany Canal Roges. En ce jour, l'eau était bien plus verte que ce que montre la photo prise depuis le début de la crête qui descend de la Tose du Siscaro... Derrière la ligne de crête, à gauche, on observe le domaine skiable de Soldeu, et tout au fond, celui de Pal-La Massana.

Je ne reviendrai pas sur l'histoire particulière de la Soulane d'Andorre car je l'ai déjà fait. L'intérêt de l'itinéraire du jour est depuis la Tose du Siscaro d'avoir une vue parfaite sur les étangs andorrans du même nom, que l'on ne peut avoir depuis le pic de la Cabanette. Ces derniers lacs présentent une particularité avec les tiges de l’espèce de soude aux fleurs rosées qui y pousse, la Salsola vermiculata, le “siscall” en catalan, qui donnent un ton différent au bleu de l’eau (ça ne sera pas si visible que cela sur la photo), et son nom au lac qu’on appelle donc communément Siscaró. Cela permet aussi de présenter l'étang du Sisca, côté français, sous un autre point de vue d'ailleurs, dont le nom également a peut-être la même origine. Le contraste est cependant assez intéressant entre le versant au soleil de la soulane et la vallée du Sisca plus verte en cette saison. La nature a fait preuve de résilience et les épisodes inquiétants de sècheresse et de chaleur qui ont marqué l'été, y sont moins visibles...

Photo 4: L'étang du Sisca (2187m), de 4,5 hectares, en contre-bas et en face en remontant la porteille du Sisca (2440m). Sur la droite dans le prolongement de la crête, on accèdera facilement au pic de Nérassol (2633m). Le petit étang de régalecio est dans l'ombre à gauche au dessus de l'étang du Sisca. Regalecio ou en catalan regalessia, selon Joan Becat, déjà cité, vient, en Andorre, comme dans les Pyrénées catalanes ou occitanes, de la regalèssia qui "est le nom donné à un petit trèfle rampant des pelouses alpines (trifolium alpinum), dont la racine a un goût qui rappelle celui de la réglisse (Glycyrrhiza glabra, également regalèssia en catalan). Les pelouses à regalèssia abondent surtout en solana et sont très recherchées par les bergers pour les troupeaux d'ovins."

Photo 5 : D'un peu plus près, l'étang du Sisca et au dessus dans le versant un des cinq petits étangs qui jalonnent le cirque du Sisca. Celui-ci est sans nom et en voie de comblement avancé, et c'est pour cela peut-être que j'ai une affection un peu particulière pour lui... L'autre jour en passant par là lors du trophée de l'isard (toujours le dernier dimanche d'Août normalement), même si j'étais heureux d'y courir (enfin pas tout le temps...) avec mes amis, je m'en suis un peu trouvé frustré de ne pas pas pouvoir l'admirer à ma guise...

Photo 6: Pour terminer la journée, on passera par le barrage du Sisca, bien plein. Le chemin derrière à droite, est celui que l'on aura emprunté à l'aller pour rejoindre la crête... et qu'emprunte (et empruntaient surtout) les troupeaux pour rejoindre aussi la soulane d'Andorre qui faisait partie d'un vaste circuit de pâturages afin de mieux gérer les ressources en herbe pendant les estives.